- 29/8/2022 -
Radicalité ou autonomie ? Les Verts doivent trancher
EELV cherche à se réinventer. Plusieurs courants ont présenté leur projet aux journées d’été à Grenoble. Un premier plus radical et partisan d’un fort rapprochement avec LFI. Le second, plus institutionnel, désire plus d’autonomie.
Grenoble (Isère), reportage
Il fait une chaleur torride ce jeudi 25 août dans l’amphithéâtre Louis Weil de l’université de Grenoble. La nuit tombe et la salle de 700 personnes est pleine à craquer. Le public s’évente avec ce qui lui tombe sous la main : des tracts militants, le programme des ateliers ou un éventail aux couleurs d’Europe Écologie-Les Verts (EELV). « Allez, on va se mettre topless », rigole l’eurodéputée Karima Delli en débarquant dans la salle. Malgré la moiteur difficilement supportable, les militants EELV sont venus en nombre écouter le dernier discours de Julien Bayou en tant que secrétaire national des Verts. Le député — également conseiller régional d’Île-de-France — va en effet laisser sa place en décembre, lors du prochain congrès du parti.
Vêtu d’une chemise blanche — sans cravate —, le visage dégoulinant de sueur, il a dressé le bilan de ses trois dernières années. « Nous avons multiplié par deux le nombre de conseillers régionaux, départementaux et le nombre de maires. Nous avons le plus grand groupe parlementaire de l’histoire de l’écologie politique à l’Assemblée avec vingt-trois députés. Nous avons multiplié par trois le nombre de nos adhérents [1]. Nous pouvons être fiers », a-t-il déclaré sous des applaudissements retentissants. Il a également reconnu « un échec collectif » à la présidentielle et assuré que le parti allait prendre une nouvelle direction, faire sa « métamorphose » et « révolutionner l’offre politique ».
Sur le campus de l’université qui a accueilli ces journées d’été les 25, 26 et 27 août, beaucoup de militants s’interrogent. Pourquoi n’y a-t-il pas eu de raz-de-marée électoral pour les Verts, alors que le chaos climatique est désormais dans tous les esprits ? Quelle stratégie politique faudrait-il déployer pour enfin conquérir le pouvoir ? Quel avenir au sein de l’alliance Nouvelle union populaire écologique et sociale (Nupes) ? Qui prendra la place de Julien Bayou ?
Pour répondre à toutes ces questions, il faut se lancer dans une chasse au trésor afin de trouver les différents groupes affinitaires qui préparent des motions. Il s’agit de textes, sortes de mini-programmes électoraux, qui serviront de base à la construction de coalitions en vue de prendre la tête du parti au prochain congrès. Dans le foisonnement des tribunes présentées durant les trois jours, force est de constater qu’il n’y a pas de différence idéologique fondamentale. Tout le monde veut refonder le parti, l’ouvrir à la diversité, mettre en valeur les territoires, capter l’électorat rural, ainsi que ceux des petites villes et des quartiers populaires, être plus inclusif, plus féministe, plus antiraciste. On peut néanmoins distinguer deux grandes tendances.
La Suite : les héritiers du parti
La première et la plus médiatisée s’appelle La Suite. Elle est menée par Marine Tondelier, l’énergique conseillère régionale des Hauts-de-France et conseillère municipale à Hénin-Beaumont, le fief du Rassemblement national. Avec son équipe, ils ont travaillé d’arrache-pied tout l’été pour sortir un copieux document de 90 pages dressant les grandes lignes de leur future motion. Une liste de bonnes résolutions qui promet de « mettre l’écologie politique au service des luttes, lancer les états généraux de l’écologie, soutenir et intégrer les classes populaires dans l’écologie politique, porter la voix de l’écologie dans les ruralités », etc.
« Ce n’est pas la continuité ni la rupture », explique avec enthousiasme Marine Tondelier face à la presse. Son collectif a déjà publié une tribune dans Le Journal du dimanche signée par près de 1 500 personnes, notamment les cadors du parti. « Preuve que nos idées fédèrent », assure Marine Tondelier. Si elle n’est pas encore officiellement candidate, elle ne laisse pas de doute sur ses ambitions. D’autant qu’elle est soutenue par une bonne partie des cadres des Verts. « Elle sait tenir la boutique, on ne lui fera jamais rien faire contre les intérêts du parti », analyse la politiste Vanessa Jérome.
Les plus radicaux
Face à La Suite, le courant plus radical est incarné par deux tendances : La Force et Le Souffle, autour de la députée Sandrine Rousseau et d’Alain Coulombel, porte-parole d’Europe Écologie-Les Verts. Les deux motions convergent vers une même idée. « Politiser le congrès sur la radicalité pour porter un réel projet de rupture face aux enjeux de justice sociale et climatique. Comment sortir d’un parti de CSP+ urbain et Blanc ? Comment amener d’autres gens plus précaires à la politique ? Comment créer un maillage territorial avec des gens qui militent au quotidien ? » s’interroge Mélissa Camara, élue à Lille et rousseautiste.
Ce qui les différencie de la team Tondelier ? Ils n’ont jamais tenu les rênes du bureau exécutif. « Pendant trois ans, ceux qui ont été à la tête du parti n’ont rien fait. Pour préparer l’avenir, il faut faire monter de nouvelles personnes », assure Romain Rosso, du bureau exécutif régional Provence-Alpes-Côte d’Azur (Paca) et membre du Souffle. Son camarade Alain Coulombel renchérit : « Marine Tondelier s’inscrit dans la continuité de [Cécile] Duflot dont elle a été l’attachée parlementaire. Cela fait des années qu’elle est au bureau exécutif. Elle considère qu’elle seule a la légitimité pour diriger le mouvement. »
La multiplicité des motions
Entre ces deux grandes tendances, pas moins d’une douzaine de textes ont été rédigés et regroupés sur le site internet Une agora pour l’écologie. « Le parti n’a aucune obligation de mettre quoi que ce soit en place avant que le congrès ne soit convoqué en octobre, explique Hélène Hardy, membre du bureau exécutif. Mais nous sommes quelques-uns à avoir lancé ce blog pour intégrer les contributions au fur et à mesure qu’elles arrivent. »
Hélène Hardy est membre du Lien, future motion qui souhaite mettre l’accent sur les territoires et la diversité. Une idée lancée par Damien Melville, qu’ont rejointe l’eurodéputée et conseillère régionale des Hauts-de-France Karima Delli, ou encore Claire Desmares, présidente du groupe écologiste à la région Bretagne. « En interne, il n’y a pas de représentativité. Regardez la photo de ce matin avec tous les élus écologistes, soupire Naïga Stefel, conseillère départementale du Val-de-Marne. Si on ne se fait pas violence, on aura du mal à évoluer pour rassembler plus largement », dit elle.
Une autre future motion est menée par Vincent Dubail, membre du conseil fédéral et proche de Yannick Jadot. Baptisé De l’ambition pour l’écologie politique, ce texte désire notamment lancer des états généraux de l’écologie pour dresser un état des lieux de la société, afin de mieux répondre aux besoins des électrices et électeurs.
Signalons aussi le collectif Refondation, porté notamment par Régis Godec, co-secrétaire régional EELV Midi-Pyrénées. Il plaide pour une troisième voie entre les radicaux et les institutionnels. « Les deux options sont complémentaires. Nous voulons défendre une société émancipatrice, avec un message positif qui permettrait d’embarquer les gens. » Mentionnons enfin une dernière contribution : la Cité écologique, rédigée par Frédéric Kalfon ainsi que Claire Monod, des anciens de Génération·s qui se revendiquent du chercheur Serge Audier. Ils plaident pour une réforme constitutionnelle « qui permette de faire advenir une société écologique qui puisse sortir de la croissance ».
Un foisonnement intellectuel
« Moi, je vais faire une motion pour dénoncer les motions, car j’en ai marre. Elles ont toutes le même programme à 90 % », s’exclame un militant rencontré sous le barnum... des motions. Il est en effet difficile, voire impossible pour un sympathisant lambda, de s’y retrouver entre tous ces textes et de comprendre les enjeux de pouvoir qui les sous-tendent. Mais ce foisonnement est aussi le signe d’une grande vitalité intellectuelle et démocratique au sein des Verts. Un parti qui demeure encore très horizontal, laissant le débat d’idées s’exprimer, les courants politiques s’affronter pour parfois se retrouver. Un fonctionnement à l’inverse de La France insoumise (LFI), une structure plus verticale, où la tête décide et où la masse suit les consignes. « Eux sont efficaces, mais ils devraient être plus démocratiques. Nous sommes très démocratiques, mais il faut qu’on soit plus efficaces », remarque Marine Tondelier.
Quelle alliance avec LFI ?
La France insoumise, et plus globalement l’alliance Nupes, est justement le gros point de divergence entre toutes ces motions. Les plus « radicaux » veulent renforcer ce partenariat au-delà du Palais Bourbon. « La Nupes n’est pas quelque chose qu’on prend et que l’on jette au gré des élections. Mais il faut poser la question des équilibres en son sein. On sort de la présidentielle où LFI est leader, mais pour les européennes l’écologie est toujours forte. Les équilibres doivent changer en fonction de ce que l’on veut porter », explique Sandrine Rousseau.
D’autres au contraire craignent que les Verts se dissolvent dans le parti de Jean-Luc Mélenchon. « Au début, on se définissait par rapport au Parti socialiste et on oubliait de parler de nous. Je ne veux pas que cela recommence avec la Nupes. Nous ne sommes pas obligés de faire de la Nupes partout et tout le temps », dit Marine Tondelier. Pour garder son indépendance, chaque parti de l’alliance a d’ailleurs organisé ses journées d’été le même week-end, mais dans ville différente. Les Insoumis étaient à Châteauneuf-sur-Isère (Drôme), près de Valence, le Parti socialiste à Blois (Loir-et-Cher) et le Parti communiste à Strasbourg.
Toutefois, plusieurs élus ont fait des allers-retours entre ces villes. À Grenoble, dans la chaleur de l’amphithéâtre Louis Weil, plusieurs députés France insoumise, socialistes et communistes étaient présents jeudi soir lors de la plénière. Parmi les invités également, Philippe Martinez, le secrétaire général de la CGT : « Il faut rester lucide : nous avons 90 députés fachos à l’Assemblée nationale. Cela n’était jamais arrivé. Il y a une réelle banalisation des idées racistes. Il faut aujourd’hui réussir à travailler ensemble, tout en préservant notre indépendance. Nous avons besoin de cette perspective politique. » Un bel appel à la l’union.
https://reporterre.net/Radicalite-ou-autonomie-Les-Verts-doivent-trancher?utm_source=newsletter&utm_medium=email&utm_campaign=nl_quotidienne
EELV cherche à se réinventer. Plusieurs courants ont présenté leur projet aux journées d’été à Grenoble. Un premier plus radical et partisan d’un fort rapprochement avec LFI. Le second, plus institutionnel, désire plus d’autonomie.
Grenoble (Isère), reportage
Il fait une chaleur torride ce jeudi 25 août dans l’amphithéâtre Louis Weil de l’université de Grenoble. La nuit tombe et la salle de 700 personnes est pleine à craquer. Le public s’évente avec ce qui lui tombe sous la main : des tracts militants, le programme des ateliers ou un éventail aux couleurs d’Europe Écologie-Les Verts (EELV). « Allez, on va se mettre topless », rigole l’eurodéputée Karima Delli en débarquant dans la salle. Malgré la moiteur difficilement supportable, les militants EELV sont venus en nombre écouter le dernier discours de Julien Bayou en tant que secrétaire national des Verts. Le député — également conseiller régional d’Île-de-France — va en effet laisser sa place en décembre, lors du prochain congrès du parti.
Vêtu d’une chemise blanche — sans cravate —, le visage dégoulinant de sueur, il a dressé le bilan de ses trois dernières années. « Nous avons multiplié par deux le nombre de conseillers régionaux, départementaux et le nombre de maires. Nous avons le plus grand groupe parlementaire de l’histoire de l’écologie politique à l’Assemblée avec vingt-trois députés. Nous avons multiplié par trois le nombre de nos adhérents [1]. Nous pouvons être fiers », a-t-il déclaré sous des applaudissements retentissants. Il a également reconnu « un échec collectif » à la présidentielle et assuré que le parti allait prendre une nouvelle direction, faire sa « métamorphose » et « révolutionner l’offre politique ».
Sur le campus de l’université qui a accueilli ces journées d’été les 25, 26 et 27 août, beaucoup de militants s’interrogent. Pourquoi n’y a-t-il pas eu de raz-de-marée électoral pour les Verts, alors que le chaos climatique est désormais dans tous les esprits ? Quelle stratégie politique faudrait-il déployer pour enfin conquérir le pouvoir ? Quel avenir au sein de l’alliance Nouvelle union populaire écologique et sociale (Nupes) ? Qui prendra la place de Julien Bayou ?
Pour répondre à toutes ces questions, il faut se lancer dans une chasse au trésor afin de trouver les différents groupes affinitaires qui préparent des motions. Il s’agit de textes, sortes de mini-programmes électoraux, qui serviront de base à la construction de coalitions en vue de prendre la tête du parti au prochain congrès. Dans le foisonnement des tribunes présentées durant les trois jours, force est de constater qu’il n’y a pas de différence idéologique fondamentale. Tout le monde veut refonder le parti, l’ouvrir à la diversité, mettre en valeur les territoires, capter l’électorat rural, ainsi que ceux des petites villes et des quartiers populaires, être plus inclusif, plus féministe, plus antiraciste. On peut néanmoins distinguer deux grandes tendances.
La Suite : les héritiers du parti
La première et la plus médiatisée s’appelle La Suite. Elle est menée par Marine Tondelier, l’énergique conseillère régionale des Hauts-de-France et conseillère municipale à Hénin-Beaumont, le fief du Rassemblement national. Avec son équipe, ils ont travaillé d’arrache-pied tout l’été pour sortir un copieux document de 90 pages dressant les grandes lignes de leur future motion. Une liste de bonnes résolutions qui promet de « mettre l’écologie politique au service des luttes, lancer les états généraux de l’écologie, soutenir et intégrer les classes populaires dans l’écologie politique, porter la voix de l’écologie dans les ruralités », etc.
Marine Tondelier avec Laura Slimani ont présenté leur future motion baptisée La Suite.
© Laury-Anne Cholez/Reporterre
« Ce n’est pas la continuité ni la rupture », explique avec enthousiasme Marine Tondelier face à la presse. Son collectif a déjà publié une tribune dans Le Journal du dimanche signée par près de 1 500 personnes, notamment les cadors du parti. « Preuve que nos idées fédèrent », assure Marine Tondelier. Si elle n’est pas encore officiellement candidate, elle ne laisse pas de doute sur ses ambitions. D’autant qu’elle est soutenue par une bonne partie des cadres des Verts. « Elle sait tenir la boutique, on ne lui fera jamais rien faire contre les intérêts du parti », analyse la politiste Vanessa Jérome.
Les plus radicaux
Face à La Suite, le courant plus radical est incarné par deux tendances : La Force et Le Souffle, autour de la députée Sandrine Rousseau et d’Alain Coulombel, porte-parole d’Europe Écologie-Les Verts. Les deux motions convergent vers une même idée. « Politiser le congrès sur la radicalité pour porter un réel projet de rupture face aux enjeux de justice sociale et climatique. Comment sortir d’un parti de CSP+ urbain et Blanc ? Comment amener d’autres gens plus précaires à la politique ? Comment créer un maillage territorial avec des gens qui militent au quotidien ? » s’interroge Mélissa Camara, élue à Lille et rousseautiste.
Romain Rosso et Géraldine Boyer, qui présentent leur texte avec les membres du Souffle.
© Laury-Anne Cholez/Reporterre
Ce qui les différencie de la team Tondelier ? Ils n’ont jamais tenu les rênes du bureau exécutif. « Pendant trois ans, ceux qui ont été à la tête du parti n’ont rien fait. Pour préparer l’avenir, il faut faire monter de nouvelles personnes », assure Romain Rosso, du bureau exécutif régional Provence-Alpes-Côte d’Azur (Paca) et membre du Souffle. Son camarade Alain Coulombel renchérit : « Marine Tondelier s’inscrit dans la continuité de [Cécile] Duflot dont elle a été l’attachée parlementaire. Cela fait des années qu’elle est au bureau exécutif. Elle considère qu’elle seule a la légitimité pour diriger le mouvement. »
La multiplicité des motions
Entre ces deux grandes tendances, pas moins d’une douzaine de textes ont été rédigés et regroupés sur le site internet Une agora pour l’écologie. « Le parti n’a aucune obligation de mettre quoi que ce soit en place avant que le congrès ne soit convoqué en octobre, explique Hélène Hardy, membre du bureau exécutif. Mais nous sommes quelques-uns à avoir lancé ce blog pour intégrer les contributions au fur et à mesure qu’elles arrivent. »
Les différents textes, dont certains pourraient devenir des motions.
© Laury-Anne Cholez/Reporterre
Hélène Hardy est membre du Lien, future motion qui souhaite mettre l’accent sur les territoires et la diversité. Une idée lancée par Damien Melville, qu’ont rejointe l’eurodéputée et conseillère régionale des Hauts-de-France Karima Delli, ou encore Claire Desmares, présidente du groupe écologiste à la région Bretagne. « En interne, il n’y a pas de représentativité. Regardez la photo de ce matin avec tous les élus écologistes, soupire Naïga Stefel, conseillère départementale du Val-de-Marne. Si on ne se fait pas violence, on aura du mal à évoluer pour rassembler plus largement », dit elle.
L’équipe venue présenter le Lien, l’une des douze motions qui souhaite prendre la tête du parti.
© Laury-Anne Cholez/Reporterre
Une autre future motion est menée par Vincent Dubail, membre du conseil fédéral et proche de Yannick Jadot. Baptisé De l’ambition pour l’écologie politique, ce texte désire notamment lancer des états généraux de l’écologie pour dresser un état des lieux de la société, afin de mieux répondre aux besoins des électrices et électeurs.
Signalons aussi le collectif Refondation, porté notamment par Régis Godec, co-secrétaire régional EELV Midi-Pyrénées. Il plaide pour une troisième voie entre les radicaux et les institutionnels. « Les deux options sont complémentaires. Nous voulons défendre une société émancipatrice, avec un message positif qui permettrait d’embarquer les gens. » Mentionnons enfin une dernière contribution : la Cité écologique, rédigée par Frédéric Kalfon ainsi que Claire Monod, des anciens de Génération·s qui se revendiquent du chercheur Serge Audier. Ils plaident pour une réforme constitutionnelle « qui permette de faire advenir une société écologique qui puisse sortir de la croissance ».
Un foisonnement intellectuel
« Moi, je vais faire une motion pour dénoncer les motions, car j’en ai marre. Elles ont toutes le même programme à 90 % », s’exclame un militant rencontré sous le barnum... des motions. Il est en effet difficile, voire impossible pour un sympathisant lambda, de s’y retrouver entre tous ces textes et de comprendre les enjeux de pouvoir qui les sous-tendent. Mais ce foisonnement est aussi le signe d’une grande vitalité intellectuelle et démocratique au sein des Verts. Un parti qui demeure encore très horizontal, laissant le débat d’idées s’exprimer, les courants politiques s’affronter pour parfois se retrouver. Un fonctionnement à l’inverse de La France insoumise (LFI), une structure plus verticale, où la tête décide et où la masse suit les consignes. « Eux sont efficaces, mais ils devraient être plus démocratiques. Nous sommes très démocratiques, mais il faut qu’on soit plus efficaces », remarque Marine Tondelier.
De nombreux ateliers ont été organisés durant les journées d’été.
© Laury-Anne Cholez/Reporterre
La France insoumise, et plus globalement l’alliance Nupes, est justement le gros point de divergence entre toutes ces motions. Les plus « radicaux » veulent renforcer ce partenariat au-delà du Palais Bourbon. « La Nupes n’est pas quelque chose qu’on prend et que l’on jette au gré des élections. Mais il faut poser la question des équilibres en son sein. On sort de la présidentielle où LFI est leader, mais pour les européennes l’écologie est toujours forte. Les équilibres doivent changer en fonction de ce que l’on veut porter », explique Sandrine Rousseau.
D’autres au contraire craignent que les Verts se dissolvent dans le parti de Jean-Luc Mélenchon. « Au début, on se définissait par rapport au Parti socialiste et on oubliait de parler de nous. Je ne veux pas que cela recommence avec la Nupes. Nous ne sommes pas obligés de faire de la Nupes partout et tout le temps », dit Marine Tondelier. Pour garder son indépendance, chaque parti de l’alliance a d’ailleurs organisé ses journées d’été le même week-end, mais dans ville différente. Les Insoumis étaient à Châteauneuf-sur-Isère (Drôme), près de Valence, le Parti socialiste à Blois (Loir-et-Cher) et le Parti communiste à Strasbourg.
Plusieurs milliers de personnes ont participé aux journées d’été à Grenoble.
© Laury-Anne Cholez/Reporterre
Toutefois, plusieurs élus ont fait des allers-retours entre ces villes. À Grenoble, dans la chaleur de l’amphithéâtre Louis Weil, plusieurs députés France insoumise, socialistes et communistes étaient présents jeudi soir lors de la plénière. Parmi les invités également, Philippe Martinez, le secrétaire général de la CGT : « Il faut rester lucide : nous avons 90 députés fachos à l’Assemblée nationale. Cela n’était jamais arrivé. Il y a une réelle banalisation des idées racistes. Il faut aujourd’hui réussir à travailler ensemble, tout en préservant notre indépendance. Nous avons besoin de cette perspective politique. » Un bel appel à la l’union.
https://reporterre.net/Radicalite-ou-autonomie-Les-Verts-doivent-trancher?utm_source=newsletter&utm_medium=email&utm_campaign=nl_quotidienne