Eric Vial
Je suis un amoureux inconditionnel de football. Mais il faut que je vous avoue quelque chose : plus on se rapproche de la coupe du monde du Qatar, plus je me sens mal à l’aise. J’ai une boule dans la gorge.
Le football est d’habitude une fête populaire bien loin des hérésies de l’organisation de cette coupe du monde qui défie toutes les lois naturelles ; 64 matchs sont prévus dans des stades climatisés à ciel ouvert alors que tous les jours, au plus haut niveau de l’État, on nous bassine avec la sobriété énergétique.
En 2019, le Qatar avait la pire empreinte écologique des pays figurant au classement de Global Footprint Network. C’est aussi le pays au monde qui rejette le plus de CO2 par habitant dans l'atmosphère.
Pire, les conditions sociales pour construire des stades en plein désert n’ont pas été respectées : au moins 6.500 ouvriers (tous immigrés) sont morts de fatigue ou de mauvaises conditions de travail, d’autres n’ont pas été payés.
S’ils faisaient des réclamations, ils étaient expulsés.
Ces travailleurs ont été considérés comme des « sous-Hommes », une simple force de travail. Tous les rapports internationaux sont accablants.
Quant aux leçons de morale sur la démocratie et sur la manière dont l’occident juge ce qui est bien ou mal, je rappelle que le Qatar est un régime réactionnaire classé en 127ème position sur 146 pays concernant l’application des droits de l’homme.
Sans oublier bien sûr le contexte plus qu’obscur de l’attribution de la coupe du monde au Qatar par la FIFA à coups de pots-de-vin ou d’incitations plus ou moins menaçantes.
Bien qu’il ne pleuve pas beaucoup dans ce minuscule émirat arabe, c’est un secret de polichinelles : de nombreux décisionnaires ont été fortement arrosés.
Sur tous ces sujets je trouve très étrange que la France, soi-disant « pays des droits de l’Homme » ne donne pas son avis éclairé.
Les amoureux de football se retrouvent donc invités à une fête sans aimer l’hôte : quel drôle et inconfortable paradoxe.
Si j’écris ces mots c’est pour me dédouaner plus tard des questions de mes enfants. Oui, nous savions que cette coupe du monde était une tragédie humaine. L’histoire nous jugera collectivement d’avoir laissé faire, sans rien dire, de telles atrocités au XXIème siècle. Nos élites mondiales porteront une lourde responsabilité.
À mon humble niveau, je ne soutiens pas et ne cautionne pas un tel événement, cela est contraire à mes convictions. J’aime le foot, je n’aime pas les jeux du cirque. 6/9/2022