Radu Portocala
« 2022 pulvérise le record de l’année la plus chaude en France », annonce « Libération », fière de pouvoir nous faire part d’une nouvelle qu’elle tient pour catastrophique.
Autrefois, il y avait « Le vrai salaire des cadres », « Le prix de l’immobilier à Paris » et autres bêtises de la sorte, qu’on nous servait année après année, avec la monotone régularité des saisons. On les appelait, pour cette raison même, des « marronniers ». Depuis quelque temps, c’est la température qui hante les rédactions et qui supplée à l’absence d’imagination des journalistes. Ils aiment les catastrophes, même quand elles ne sont que fantasmées.
Comment sait-il, le génie qui a pondu ce titre et qui veut donner l’impression d’avoir scruté toute l’histoire de la France et de son climat, que 1047, par exemple, n’a pas été une année plus chaude que 2022 ? Que lui donne la certitude de son constat péremptoire ? Rien ! Une conviction, tout simplement, qui tient d’avantage de l’idéologie que d’une science exacte.
Le journaliste qui écrit de telles choses a un très grand avantage sur le lecteur à qui il les impose : il sait que personne n’ira perdre son temps à chercher les vieilles chroniques, les anciennes statistiques, pour vérifier et comparer. Il sait qu’il peut écrire n’importe quoi à ce sujet parce qu’il est hissé sur la barricade du climatiquement correct et que quiconque s’aviserait à le contredire serait éliminé promptement du débat, accusé de pratiquer le coupable scepticisme.
Son double rôle, qu’il joue avec la bénédiction de sa rédaction est de culpabiliser les uns et de terroriser les autres. Il s’en flatte. Quel privilège d’être parmi ceux qui savent le désastre à venir, de l’annoncer, d’appeler les foules ignares à la lutte pour la survie !
Pourtant, si on regarde les vieux livres, on apprend que la Seine a séché plusieurs fois aux siècles derniers. Rien à voir !, nous dira-t-il agacé. Et, déjà, il se prépare pour l’annonce qu’il fera d’ici un an : 2023 aura été l’année la plus chaude de l’histoire.