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12 février 2023

Vive la liberté d'expression

Yann Bizien

Les rappels à l’ordre de médias indépendants ne sont jamais un bon signe dans une démocratie parce que la liberté d’expression n’est jamais définitivement acquise. Elle reste un combat de tous les jours.

Les insultes de Cyril Hanouna au député Louis Boyard valent à C8 une amende record. L’Arcom sanctionne d’une pénalité très dissuasive de 3,5 millions d’euros la chaîne du groupe Canal+ pour les insultes proférées par l’animateur de « TPMP » à l’encontre de l’élu, le 10 novembre.

Pour mémoire, l’Arcom est réputée être une autorité publique indépendante. Composée d’un collège de neuf membres, son président est nommé par décret... du président de la République.

Notre régime politique dominé et encadré par l’exécutif prend sérieusement des tournures autoritaristes et arbitraires. Je les avais perçues durant la crise des Gilets jaunes. Je les avais à nouveau constatées pendant la crise sanitaire. Je les ai vues dans la dissolution de certaines associations conservatrices et patriotiques. Je les vois aussi dans la censure instituée sur les réseaux sociaux. Je le vois également dans l’instrumentalisation politique de l’actualité. Je le vois encore dans les processus constitutionnels prévus pour tenter de réformer en force nos retraites. Et je le constate enfin dans les rapports du pouvoir aux médias, ce qui est précisément confirmé par la toute dernière interview de la ministre de la culture, et de la censure, Rima Abdul-Malak, sur France Inter qui n’est pas en France la radio publique la plus pluraliste.

Je ne confonds pas le besoin d’autorité avec l’autoritarisme qui est un abus et un excès d’autorité.

Ce durcissement du régime politique sous les quinquennats d’Emmanuel Macron se voit principalement dans sa volonté de réduire les marges de manœuvre de nos libertés, en particulier de notre liberté d’expression et de la liberté de la presse.

Nous pouvons le constater sur le contrôle serré, le subventionnement ciblé et la pression exercée sur les médias non bridés. Plus les médias sont conformistes et partisans du pouvoir, plus ils auront les faveurs de l’exécutif. Plus ils seront critiques, moins ils auront de subventions et plus ils risqueront les foudres de l’ARCOM.

C’est le cas de CNEWS, de C8, mais aussi de Valeurs actuelles, plutôt indépendantes et éloignées du pouvoir, critiquées pour leurs supposés manquement au pluralisme et menacées dans le processus de reconduction de leurs fréquences.

Mais pourquoi ce pouvoir ne critique pas BFM TV, sa propre agence de communication, qui refoule en permanence tout ce qui s’éloigne du centre de gravité politique macroniste et piétine par conséquent le pluralisme ?

C8 et CNews rassemblent chaque jour près de 11 millions de citoyens français. Cette audience représente donc une menace inavouée pour le pouvoir soucieux de verrouiller nos droits fondamentaux dans sa démocratie du deux poids, deux mesures.

Pour un régime autoritaire, qui veut avoir le monopole des idées, les médias libres doivent se soumettre ou disparaître.

Avec Emmanuel Macron, la police de la pensée et le contrôle de notre expression ont encore de beaux jours parce qu’il ne les voit pas comme une valeur suprême à préserver mais comme une menace.

La liberté de pensée est absolue, ou elle n’est rien. La vraie liberté d’expression est également celle dont on profite sans condition, pourvu qu’elle soit responsable, qu’elle ne diffame pas, qu’elle ne soit pas injurieuse.

La liberté d’expression appartient donc à ceux qui l’ont conquise. Il ne faut jamais la mendier aux autres. Il faut la prendre. Et quand tout va mal dans une démocratie, la dernière liberté du peuple est celle qui consiste à changer de gouvernants.

« Tout esclave a entre ses mains le pouvoir de briser ses chaînes » disait William Shakespeare.

Vive les médias libres et indépendants, et les journalistes non alignés sur le pouvoir. 10/2/2023