Maxime Tandonnet
Il faut le dire et le répéter. La réforme des retraites, en particulier les 64 ans qui provoquent la colère, est inutile et injuste. L’âge moyen d’entrée sur le marché du travail en France est de 22, 5 ans (INSEE). Le nombre d’annuité nécessaire pour toucher une retraite à taux plein est de 43. Dès lors l’âge moyen théorique de la retraite n’est pas 62 ans, mais plutôt 65,5 ans.
Les 64 ans ont en vérité pour objectif de faire travailler, au-delà de 43 annuités, les personnes, en minorité, entrées sur le marché du travail avant 21 ans, ayant fait peu d’études, notamment les travailleurs manuels. Dans la plus grandes opacité, plusieurs aménagements en faveur des carrières longues permettent à certaines classes d’âge d’éviter ce couperet, mais il reste des poches d’injustice non réglées grâce auxquelles le pouvoir peut se targuer de quelques économies, évidement infinitésimales au regard des 560 milliards de dettes accumulées par le pouvoir macroniste en deux ans (Cour des Comptes).
Alors pourquoi cette réforme ? Fondamentalement emblématique, elle symbolise la poigne jupitérienne et la mise en œuvre de la volonté présidentielle de « transformer la France ». Elle exprime la détermination du pouvoir macronien à faire plier une Nation qui refuse les 64 ans en raison de leur caractère injuste, visant les « sans-dents », les « Gaulois réfractaires », « ceux qui ne sont rien et ne peuvent même pas se payer un costume », les « fainéants » et les « illettrés ». Elle incarne la morgue et le mépris de la sphère dirigeante actuelle envers les gens, le peuple. Nous sommes dans une violente épreuve de force emblématique, une logique de guerre civile entre d’une part ceux « d’en haut » qui prétendent faire le bien du pays contre lui-même, c’est-à-dire l’équipe au pouvoir retranchée derrière les murs de ses palais dorés et les cordons des forces de l’ordre, et d’autre part la population de ce pays dans son immense majorité souvent en souffrance sociale, qui soutient la contestation à cette réforme.
Ce qui s’est passé le 1er mai est une honte absolue. Le pays a sombré une nouvelle fois dans la violence, le sang et les flammes. Plus de 100 policiers ont été blessés, dont un grièvement brûlé. Ces chiffres, qui s’accumulent depuis quatre mois, montrent la profondeur du chaos dans lequel la France a durablement sombré. l’image que donne la France à l’étranger est celle d’un pays dévasté. Évidemment les auteurs de ces abominations contre les forces de l’ordre sont des criminels. Mais ceux qui ont provoqué par autocratie, aveuglement et exubérance vaniteuse les circonstances de cette tragédie, sont eux aussi impardonnables.
Rarement, la politique française n’avait sombré dans un tel niveau de déchéance depuis 1945. Le pouvoir macroniste est évidemment le principal responsable de ce fiasco et de ce chaos. La gauche mélenchoniste n’a jamais fait que souffler sur les braises de la violence. La droite lepéniste – modèle de discrétion – se frotte ostensiblement les mains en espérant tirer les marrons du feu de cette calamité en 2027… Mais c’est loin 2027. La droite classique a choisi le camp macroniste de cette réforme absurde et injuste, contre le pays, manquant une occasion historique de se poser en protectrice du peuple.
Il reste une poignée de responsables politiques, dont Charles de Courson et d’autres, en dehors d’une logique partisane, qui ont montré le cap de la sagesse, de l’apaisement, du sens de l’État et de la vision historique. Evidemment sans être écoutée tant le climat est à l’aveuglement, au délire vaniteux, à la courtisanerie. Dans les périodes de trouble profond, le redressement part toujours d’une infime poignée de visionnaires. S’il reste une lueur d’espoir pour l’avenir de la France, certes faiblarde, elle est à chercher de ce côté-là.