Au royaume de Koikilenkouth Premier, les dettes se sont un peu trop accumulées et certains auditeurs (comme Fitch par exemple) ont émis des doutes sur sa capacité à rembourser ces créances babylonesques. Pruno Le Maire, entendant le message, a donc décidé qu’il était temps de faire mine de s’attaquer au problème.
L’annonce est officielle puisque c’est au cours des “Assises des Finances Publiques” (“Assises” car il vaut mieux l’être pour encaisser sereinement ce qui est envisagé) lancées ce lundi que ce nouvel effort de redressement global des finances du pays a été détaillé. C’est donc tout logiquement que les fines équipes du Ministère de l’Économie vont entreprendre d’en finir avec le temps des aides tous azimuts – notamment celles liées au Covid – et qu’elles se sont lancées dans la recherche minutieuse de ces sources d’économies afin de maquiller d’établir un budget 2024 crédible.
Le défi est à la hauteur du Ministre dont l’intellect, dilaté comme jamais, sera mis entièrement à contribution. En effet, pour parvenir à boucler ce budget, Pruno devra éviter toute hausse d’impôts, le Chef de l’État ayant clairement exclu cette possibilité. Et pour un défi, ce sera un défi de taille car non seulement, ce sera sans impôts, mais pour notre frétillant renflement gris de Bercy, “Désormais, il est temps de revenir à la normale. Mais cela ne veut pas dire l’austérité.”
Oui, vous avez bien lu : pas d’austérité et pas de nouveaux impôts, mais redressement quand même !
Redressement car le Ministère des Trous Béants vise une solide baisse des dépenses de l’État tout autant que des collectivités territoriales, ce qui ne va pas être simple, au contraire des objectifs – déjà fixés – qui sont d’amener la dépense publique à 53,5% du PIB en 2027 (contre 57.5% en 2022) pour – soi-disant – tenter de refaire passer les déficits en-dessous du totémique et pifométrique 3% du PIB.
L’objectif est pointé et les moyens sont évidents : il va falloir réduire sans austérité c’est-à-dire couper sans couper, et imposer sans taxer tout en taxant sans imposer. Le “En Même Temps” macronien s’illustre ici comme une dentelle fine, toute en clairs-obscurs subtils et transparences trompeuses qui se traduira par une sorte de magie financière dont on ne peut même pas encore soupçonner la complexité.
Il faut dire que l’option d’endetter à nouveau le pays n’en est plus tout à fait une : à mesure que les taux d’emprunt remontent, cette dette coûte de plus en plus cher. Et les agences de notation ont clairement fait savoir que la France était en train d’épuiser ses dernières cartouches avant une dégradation de sa note, entraînant mécaniquement un renchérissement de cette dette déjà coûteuse.
C’est un peu pour cela que Pruno demande à chaque ministère de faire un petit effort, de réduire son budget de 5%. C’est bien, 5%, c’est un chiffre simple, c’est propre et ça permettrait, sur le papier, de faire 10 milliards d’économies. Devant un déficit annuel qui va confortablement s’installer autour des 120 milliards (soit 12 fois cette économie potentielle) et une dette totale 300 fois plus grosse que le petit coup de rabot envisagé, on comprend que ce n’est pas tout à fait le bon moment pour crier victoire.
Rassurez-vous, cela n’empêchera ni Pruno ni toute sa troupe de clowns de continuer à endetter le pays mais au moins auront-ils fait preuve, sur le plan de la communication, des affichages nécessaires de rigueur, de sérieux et de solennité qui rassurent.
Au passage, sentant probablement qu’on allait les entuber encore une fois, les maires français n’ont pas daigné se déplacer pour participer aux Assises. Prétextant qu’ils n’auraient rien pu dire et que l’élimination de plusieurs impôts locaux dont leurs communes bénéficiaient jusqu’à présent les a mis dans l’embarras financier, ils ont décidé de bouder, et ce d’autant plus qu’ils notent, amers, qu’ils vont devoir composer avec les efforts budgétaires imposés tout en augmentant leur masse salariale : la revalorisation du point d’indice des fonctionnaires territoriaux va leur coûter 2 milliards d’euros (au lieu d’un prévu).
Cependant, les larmes du contribuable peineront probablement à sortir lorsqu’on se rappellera que ces mêmes collectivités n’ont pas arrêté d’embaucher à tour de bras depuis des lustres et qu’ils payent donc maintenant ces choix calamiteux empilés d’années en années pour faire plaisir aux électeurs : entre 1997 et 2020, alors que la population n’augmentait que de 13%, les effectifs de la fonction publique augmentaient de 22% (soit 69% plus vite) ; sur la même période, la seule fonction publique territoriale augmentait de 47%.
Mais en face, reconnaissons-le, les services publics dispensés se sont heureusement tellement améliorés qu’au moins peut-on se dire qu’on en a pour notre argent. Ah ah ah.
Parallèlement, on comprend bien que les gesticulations du Pruno de Bercy se font tout en conservant la plupart des buts idiots (ou carrément suicidaires) que cette brochette d’imbéciles nous ont fixés arbitrairement, à commencer par cette transition énergétique qui va achever le reste de potentiel industriel du pays.
Vous l’aurez compris : l’heure est à la communication, à la préparation des esprits à une déferlante de coupes arbitraires, de préférence dans un régalien déjà consternant de médiocrité. Tout le reste, cette prétention à redresser les finances, à faire attention et tenter de remettre l’économie dans de bons rails, n’est que pure fanfreluche, du cirque, de l’esbrouffe.
Cette esbrouffe est présentée devant les Français, mais elle ne leur est absolument pas destinée, car les sans-dents ne sont rien et le cheptel n’a pas son mot à dire. Non, ici, le spectacle est à destination des financiers : il faut les rassurer, notamment sur la capacité de la France à rembourser ses dettes et plus exactement la capacité de l’État à aller prendre – de force, bien sûr – l’argent là où il est, c’est-à-dire non pas chez les riches (fiscalement rares en France), mais chez les autres qui ne sont pas riches mais qui sont très nombreux, désorganisés, isolés et qui ne voient pas venir le coup de massue.
Sans ces annonces, sans ces gesticulations oratoires, les taux risqueraient de grimper trop vite. Et rapidement, les choses tourneraient au vinaigre : le budget ne pourrait être tenu, pas plus que les dépenses sociales ne seraient versées.
Voilà qui pourrait agacer tout le monde, vous ne croyez pas ?