Pourquoi suis-je carrément contre l’uniforme à l’école, et suis-je ainsi à contre-courant de l’époque ? Et à contre-emploi de ma présumée tradition politique ? Parce que, de mon point de vue, cette idée est assez malsaine, dans la catégorie des fausses bonnes idées. On imagine que l’habit fait la discipline. Pas plus qu’il ne fait le moine. Ce n’est pas parce que tous les enfants, collégiens, lycéens, porteraient une tenue identique qu’il seraient plus sages et plus attentifs. L’habit ne fait pas le moine. Là on est dans l’illusion. Tous pareils dans la forme, donc tous pareils sur le fond : absurde. La mode est à l’autorité, aux oukases, aux petits chefs, à l’ordre soi-disant… Illusion, cette mode ne sert qu’à recouvrir l’impuissance, le chaos la violence. Faute de réussir à combattre l’absentéisme, l’échec scolaire, la violence, la drogue, le communautarisme, l’effondrement vertigineux du niveau en mathématiques et en orthographe ou en histoire, on se donne l’illusion du contrôle en imposant aux élèves l’uniformité vestimentaire. L’abaya touche quelques centaines de scolaires sur 12 millions. Faut-il imposer de lourdes contraintes à 12 millions d’élèves et leurs parents pour quelques centaines de trublions? Au fond, vouloir parader sur le thème de l’uniforme en classe, c’est une manière de reconnaître qu’on est incapable d’imposer une tenue correcte – libre mais correcte – à 12 millions de scolaires. Ce n’est pas un signe de force des institutions. C’est un aveu de faiblesse. Moi je suis de ceux qui pensent que l’école est là pour enseigner la pensée, la réflexion, l’esprit critique, fournir des bases à la curiosité intellectuelle. Elle n’est pas là pour uniformiser, cloner, encaserner. Mieux valent des dépenses en livres, en crayons et en cahiers qu’en tenue réglementaire. Mais n’ayons aucune crainte : encore un coup de menton qui s’achèvera comme tout le reste. Il est simplement dommage que la ruée soudaine des politiciens de tout bord vers cette idée d’uniforme à l’école ne soit rien d’autre que le signe patent d’une incapacité à imposer une tenue correcte, propre, convenable. Donc, aveu de faiblesse. Et ne parlons même pas de la discipline. Vous n’êtes pas d’accord ? Tant mieux, la liberté commence par le débat, l’échange et la discussion, la tolérance aux idées d’autrui. 6/9/2023