Gilles La Carbona
Secrétaire national du RPF au suivi de la vie parlementaire
Depuis plusieurs années on se désole de la piètre qualité de nos dirigeants politiques. Le jeunisme qui a prévalu jusque-là devait assurer un renouvellement salutaire et nous conduire à découvrir de nouveaux génies, qui devaient nous emmener vers une ère de prospérité jamais rencontrée. On allait même se délecter de leurs analyses et façons de penser… le moins que l’on puisse dire, c’est qu’on a vu le changement, ça c’est indéniable. On nous a fait croire que l’énergie de la jeunesse pourrait remplacer l’expérience et en fait, ils n’ont ni expérience, ni énergie. L’originalité qui devait nous séduire n’a pas supporté le mur du réel. Dernier haut fait d’un de ces représentants, l’interview de notre ministre des affaires étrangères, Jean-Noël Barrot, sur Cnews. Interrogé sur la situation en Ukraine et la Russie, le ministre des Affaires étrangères qui semblent lui être effectivement très étrangères, adopte un regard d’acier et se perd dans son propre néant. Il s’est livré à une analyse des plus romanesques, pour rester courtois. Selon lui, La Russie est exsangue, un déficit abyssal conduirait le pays au bord de la faillite, la pénurie de main-d’œuvre le prouve et Poutine est obligé de demander l’aide aux Coréens pour soutenir le front. Il n’est quand même pas allé jusqu’à nous dire que les Ukrainiens volaient de succès en succès, mais on en n’était pas loin.
Une telle dissonance avec la réalité est effrayante. Il balaye d’un revers de main le classement récent du FMI qui place la Russie au 4ème rang devant le Japon et l’Allemagne, avec une croissance à plus de 3%. Poutine serait isolé, ce n’est pas l’image que le monde entier a pu avoir, suite au sommet des BRICS, mais Barrot ne veut pas en entendre parler, ou plutôt, il répète la leçon bien apprise. Pour ce qui concerne sa pénurie de main-d’œuvre elle est due au fait que son industrie tourne à plein régime et pas uniquement dans un effort de guerre. La Russie connaît le plein emploi, notion devenue ubuesque en Occident et en France en particulier, et c’est pour cette raison que ce pays manque de main d’œuvre. Le fameux déficit catastrophique, a été en réalité estimé à 1,7% du PIB. Se plairait-il à le comparer avec le nôtre, celui laissé par ses amis ?! Quant aux soldats coréens qui seraient nécessaires pour contenir un front visiblement en perdition, selon la pensée à peine voilée de notre ministre, non seulement aucune preuve ne vient étayer cette information, mais elle est ridicule. Plus de 300 000 volontaires ont été formés et attendent de rejoindre les quelque 400 000 soldats levés lors de la mobilisation partielle. Mais tous ces éléments notre ministre ne les connaît pas, ou ne veut pas en entendre parler et reste focalisé sur une vision grotesque des choses.
Et le voilà qui renchérit en n’excluant ni l’envoi de troupes françaises au sol, ni le ciblage de la Russie par des missiles français. Il a l’air d’ignorer que nous disposons d’à peu près deux jours de munitions en cas de guerre de haute intensité et que la Tsar-Bomba de Poutine pourrait liquider la France en un seul tir que nous n’avons pas vraiment les moyens d’intercepter. On se demande s’il est en roue libre ou s'il est télécommandé et par qui ? On ne saurait trop lui conseiller, à ce jeune quadragénaire de faire comme de Gaulle, d’être au devant de ses troupes, sur le terrain, il a encore l’âge d’un soldat. Ce fils de son père, Jacques Barrot, ministre, qui a usé ses fonds de pantalons sur les bancs du très sélect lycée Henri IV, avant de faire HEC, n’a pas dû rencontrer le réel trop souvent. Les plaines ukrainiennes boueuses sous le feu russe lui feraient une solide expérience du haut de laquelle il pourrait parler de guerre avec plus de justesse.
L’immaturité de l’analyse pose question et on imagine bien que ce n’est pas le seul domaine dans lequel cette perception sévit ; en économie, en matière budgétaire, monétaire, sociétale, partout nous sommes soumis à ce type de délires ou mensonges en forme d’idéologie préfabriquée et obligatoire. Est-il mauvais, mal conseillé, ou est-ce sciemment qu’il tient ce discours ? Notre pays est dirigé par un enfant capricieux, qui s’est entouré d’adolescents immatures. Les assertions de Barrot sur la fragilité de l’économie russe qui serait la conséquence des sanctions prises rappellent un certain Le Maire quand il comparait le PIB de l’Espagne à celui de la Russie, pour affirmer que son asphyxie était inévitable. On a tous pu constater le résultat, tous, sauf Barrot. Nous sommes donc contraints de supporter les décisions de ces « sardanapales » auto suffisants, arrogants et totalement déconnectés d’une réalité qu’ils refusent, même quand elle leur revient dans la figure.
L’inversion des valeurs est leur sport favori. Nous l’écrivions il y a quelques jours dans nos colonnes. Leurs propos sont en permanence coupés du réel, pour la bonne et simple raison que ce réel ne correspond pas à ce qu’ils voudraient qu’il soit. Ils flottent dans un monde qui n’existe que dans leur esprit perturbé, et malheureusement c’est la qualité essentielle qui est recherchée par Macron pour les choisir et leur donner des postes à responsabilités. Il est donc évident que ce cirque pathétique continuera tant que Macron sera à la tête de l’État. Le pire c’est que les journalistes n’osent même pas les reprendre sur des déclarations aussi farfelues et erronées que celles-ci. La peur d’offenser est devenue plus forte que l’outrage fait à l’intelligence du peuple, et à la vérité des faits. Nous ne parviendrons pas à inverser cette psychose qui a envahi les plateaux, tant que le bon sens sera écarté car jugé injuriant, dès lors qu’il sert à remettre la vérité à sa place. Mais est-ce possible dans un pays ou 90% de la presse est contrôlée par quelques milliardaires proches du pouvoir et qui en plus reçoivent de l’argent public pour diffuser la propagande et endormir la majorité de la population ? La réponse est non, et nous allons devoir supporter encore quelques temps des sorties aussi décalées que celle de ce ministre, sauf si ce gouvernement était renversé, mais là encore, rien n’est moins sûr.