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18 avril 2025

Chassez le socialisme, il revient au galop

Jean Mizrahi

-18/4/2025- Le gouvernement songe sérieusement à instaurer un remboursement différencié des médicaments selon les revenus. Autrement dit : deux citoyens, deux tarifs. Pourquoi pas aussi un ticket de métro à géométrie variable pendant qu'on y est ? Oui, ce système existe dans certains pays. Mais, petit détail : ces pays n'ont pas empilé, comme nous, soixante-dix ans de couches sociales, de niches, de seuils, de dispositifs imbriqués, créant une cathédrale administrative plus complexe que la mécanique quantique. En France, chaque nouvelle idée "solidaire" devient une usine à gaz, dont la fiche de poste principale est de punir les classes moyennes et dévaloriser les efforts de ceux qui travaillent.
Encore une fois, ce sont les plus obstinément étatistes de notre paysage politique qui ressortent leur boîte à idées... ou devrais-je dire leur boîte de Pandore. Une énième mesure bricolée pour ajouter un étage au millefeuille social, sans jamais regarder la facture ni l’efficacité. On surcharge un édifice déjà bancal, puis on pleure quand il s'effondre.
Je défends l’idée (que je développe dans La Force et la Liberté : force-liberte.fr) une aide unique, lisible, équitable, versée automatiquement, sans avoir besoin d'un doctorat en fiscalité pour y accéder. Il est grand temps de purger notre système social de sa complexité délirante, dont le coût de gestion seul est un scandale budgétaire permanent. Un système simple est plus juste. Et un système juste n’a pas besoin de mille décrets pour fonctionner.
Soyons clairs : je ne suis pas socialiste, mais je crois à une redistribution ciblée, décente, intelligente. Une redistribution entre ceux qui travaillent, et pour ceux qui traversent des épreuves réelles : le handicap, la maladie, la vieillesse. Pas pour entretenir l’oisiveté en milieu tempéré.
Cela fait plusieurs décennies qu’on construit une machine sociale qui décourage l’effort et subventionne l’inertie. Et à chaque "réforme", on ne réforme rien, on rajoute un formulaire, une administration, un acronyme, et mille complications. L’effet ? Un système ingérable, injuste, et hors de prix. Et bien sûr, à la clé : encore des bataillons de fonctionnaires recrutés pour gérer la complexité. L'État stratège devient l'État organisateur de piles de dossiers.
Il faut sortir de cette logique absurde. Ce qu’il faut, c’est un droit à un revenu complémentaire, proportionné au nombre de personnes dans un foyer, simple, stable, intelligible. Ce serait non seulement un outil de justice sociale, mais aussi un levier majeur pour refonder une politique familiale digne de ce nom. Parce qu’un autre sujet brûle : l’effondrement de la natalité. Ce n’est plus un enjeu, c’est une alerte rouge qui clignote sur tous les tableaux de bord démographiques. Dans quelques décennies, nous payerons ce désintérêt collectif très cher.
Un homme politique digne de ce nom doit penser à vingt ans, pas à vingt jours, vingt semaines ou même vingt mois. Refuser de traiter sérieusement le défi démographique ou l’état de notre instruction publique (autre naufrage en cours), c’est refuser de regarder plus loin que le bout de son quinquennat.
Soyons lucides : notre modèle légal et social est en train d’exploser. Il coûte trop cher, et il repose exclusivement sur deux piliers qui s’effondrent : ceux qui travaillent… et une dette dont le remboursement devient une équation difficile. Mais chut : il ne faut pas en parler. Distribuer l’argent qu’on n’a pas, c’est tellement plus simple que d’expliquer qu’il va falloir changer.
À force de jouer avec les allumettes budgétaires, nous nous approchons d’une faillite dont tout le monde sent l’odeur, mais que personne n’ose nommer. Et les Français, stoïques et confiants, regardent leurs élus jouer les chefs d’orchestre pendant que le Titanic s’enfonce. Musique douce, discours anesthésiants, et eau glacée à l’horizon.
Il est grand temps de claquer la porte de la salle de bal, de monter sur le pont, et de prendre les commandes. Sinon, nous n’aurons plus ni bateau, ni orchestre, ni avenir.