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25 avril 2025

UNE NOUVELLE CRISE DANS LA SIDÉRURGIE

Jean-Claude Delhez

-25/4/2025- Depuis l'affaire du covid, depuis celle de l'Ukraine, depuis l'élection de Trump, le politicien nous explique que l'Europe est trop dépendante de l'étranger et qu'il est indispensable, existentiel, urgent, de réindustrialiser. Dans les faits, ce qui se passe est exactement l'inverse.
Prenons l'exemple de l'industrie lourde par excellence, la sidérurgie, celle qui fournit à la société le principal métal dont elle a besoin, l'acier. Arcelor-Mittal vient d'annoncer la suppression de plus de 600 emplois en France. S'ajoutant à une précédente annonce, la mesure porte sur un total de 800 licenciements. Les sites touchés sont Dunkerque, Mardyck, Desvers, Denain, Reims, Mouzon, Florange, Basse-Indre et Montataire. Quelques semaines plus tôt, c'est une autre société indienne, Tata Steel, qui annonçait également la suppression de 800 emplois, cette fois au sein de l'usine intégrée d'Ijmuiden, aux Pays-Bas. En Allemagne, le premier groupe sidérurgique, ThyssenKrupp, devait transformer ses hauts-fourneaux de Duisburg pour les alimenter à l'hydrogène plutôt qu'au charbon. Le projet vient d'être suspendu. Cette décision intervient après une autre, quelques mois plus tôt, selon laquelle le groupe va supprimer rien moins que la moitié de tous ses emplois au cours des prochains mois et prochaines années. Soit 11.000 licenciements d'ici 2030. Au Royaume-Uni, Tata Steel avait fermé les hauts-fourneaux de Port Talbot, au Pays de Galles, l'an dernier. Dès lors, il ne restait plus, dans le pays, que ceux de Scunthorpe, propriété de British Steel (qui appartient au Chinois Jingye). Ils devaient s'arrêter définitivement il y a quelques jours. C'est une fermeture chargée de symbole. En effet, ce sont les Britanniques qui ont inventé le haut-fourneau au coke (en 1709) mais aussi l'aciérie, le laminoir et toute la sidérurgie moderne. Finalement, le gouvernement de Londres a choisi d'intervenir en commandant des matières premières pour maintenir les hauts-fourneaux à feu, et les emplois induits. Sans préjuger de la suite.
La crise sidérurgique n'est qu'un exemple parmi d'autres. On peut citer les coûteux errements en matière de politique énergétique ; ou l'absence de coordination dans l'industrie de la défense ; ou encore la vente à des actionnaires étrangers d'entreprises de haute technologie. En Europe, il n'y a pas de politique industrielle.

20 avril 2025

L'ARMÉE SE REBIFFE

Jean-Claude Delhez

-20/4/2025- Il y a du flottement depuis peu dans l'armée israélienne au sujet de la manière dont le conflit de Gaza est conduit par le pouvoir politique. Il y a désormais aussi du flottement dans l'armée française, au sujet de l'Ukraine, cette fois. Je copie ce texte publié aujourd'hui par l'un d'entre vous. C'est une lettre qui vient d'être envoyée par huissier au pouvoir législatif, lettre signée, entre autres, par 38 officiers supérieurs (généraux et colonels). Ils pointent la violation de plusieurs articles de la constitution par l'engagement français en Ukraine et demandent au corps législatif de faire la lumière sur la situation qui prévaut et de se mettre en conformité avec la loi.


18 avril 2025

UKRAINE : LES RÉVÉLATIONS DU NEW YORK TIMES

Jean-Claude Delhez

-18/4/2025- Le New York Times avait déjà enquêté par le passé sur le rôle secret des USA, de la CIA en particulier, en Ukraine, lors de la guerre du Donbass, c'est-à-dire avant l'invasion russe. J'avais donné ici même un résumé en français de cette enquête. Fin mars, le journal américain a sorti une nouvelle enquête. Elle porte cette fois sur le rôle secret des USA depuis l'invasion russe de 2022 (ou, du moins, une partie de ce rôle secret). J'en donne ci-dessous, à nouveau, une brève synthèse en français.
Peu après l'invasion russe de février 2022, Washington décide de coordonner la guerre en Ukraine depuis ses bases en Europe, dans le cadre de l'OTAN. C'est ainsi que des généraux ukrainiens sont conviés à Wiesbaden, en Allemagne. C'est le quartier général américain pour les opérations militaires en Europe et en Afrique. Un partenariat est scellé. Pour coordonner cette alliance : un général ukrainien, Zabrodskyi (photo de droite), et un général américain, Donahue (photo de gauche). Sous Donahue s'organise un état-major de l'OTAN, avec un général polonais comme adjoint, un général britannique affecté à la logistique et un général canadien commis à la formation des unités ukrainiennes. Les différents services de renseignement américains intègrent ce commandement. De leur côté, les Ukrainiens implantent à Wiesbaden près d'une vingtaine d'officiers d'état-major. La guerre sera donc dirigée depuis l'Allemagne par un quartier général conjoint.
Le mode de fonctionnement est le suivant : les Américains recueillent du renseignement sur les Russes, par leurs espions, par leurs satellites, par leurs écoutes des communications... Ce renseignement leur permet de désigner des cibles à frapper sur le terrain. Ils livrent aux Ukrainiens des armements aptes à cette mission : des drones navals, de l'artillerie, des lance-roquettes à longue portée... Et les Ukrainiens détruisent les cibles russes désignées par les Américains. Quelques exemples. Le navire amiral de la flotte russe de la mer Noire, le Moskva, coulé en pleine mer ; le commandement de la redoutable 58e armée russe décapité par une frappe sur l'état-major ; la base navale de Sébastopol ciblée, grâce au travail de la CIA, par des drones qui endommagent plusieurs navires et contraignent les Russes à se replier sur un port plus éloigné (les USA avaient fourni à cet effet à l'Ukraine le prototype d'un drone destiné à s'opposer, dans le futur, à une invasion chinoise à Taïwan).
Le New York Times conclut que l'action américaine dans la guerre en Ukraine s'inscrit dans la longue suite de confrontations avec Moscou par pays interposés, comme les conflits du Vietnam et d'Afghanistan ; et que cette guerre est d'un grand intérêt pour les USA car elle leur permet de valider, ou pas, les tactiques et les armements en usage, et de tirer d'utiles leçons en vue des conflits du futur. En cela, le journal new-yorkais apporte de l'eau au moulin de Moscou qui considère que le conflit n'est pas une guerre entre la Russie et l'Ukraine mais entre la Russie et l'OTAN, l'Ukraine faisant office de ce qu'on appelle aujourd'hui un proxy, c'est-à-dire un intermédiaire au service des USA.

16 avril 2025

Jean-Claude Delhez

IL AVAIT SOIF

Je me suis fait un copain. Lui, là, sur la photo. Samedi, on tombe nez à nez sur un palier d'escaliers extérieurs. Comme tous les animaux sauvages, le lézard n'a pas confiance en l'homme. Dès qu'il en rencontre un de cette espèce, soit il s'immobilise, en attendant la suite, soit il fuit et va se cacher. Et donc, samedi, une journée faisant suite à plusieurs semaines sans pluie, non seulement l'animal ne fuit pas, mais il se retourne, descend deux marches et vient vers moi. Il s'approche à mes pieds jusqu'à une grille qui recouvre une canalisation censée évacuer de l'eau. Et il se met à fourrer sa gueule dans les trous de la grille, comme s'il voulait passer au travers. Au risque d'aller se noyer. Il fait ça à plusieurs reprises, juste devant moi. Je pars alors moins d'une minute et je reviens avec une bouteille d'eau. J'en verse sur le sol, à côté de lui. Il y pousse la tête et sort la langue à plusieurs reprises.
Ce lézard vit à cet endroit. Il sait qu'il y a une grille avec de l'eau en-dessous. Il sait aussi qu'il est trop gros pour passer par les trous et aller y boire. Mais le voilà qui en fait la démonstration juste devant moi. Comme s'il s'était dit : « Ce gars-là ne m'a pas l'air totalement idiot. Je vais essayer de lui faire comprendre que j'ai soif ; et peut-être qu'il soulèvera la grille. Parce que moi, avec mes petites pattes, je n'y arrive pas. »

14 avril 2025

LE MENU FRETIN DE LA POLITIQUE

Jean-Claude Delhez

-14/4/2025- L'un d'entre vous (qui me fournit en œufs et en littérature) m'a demandé de me pencher sur le cas d'une politicienne des trois frontières. Je suis une bonne pâte, je m'exécute (sinon, plus d'omelette...).
En ce moment, en France, il y a Rachida Dati et ses bijoux onéreux. Il y a Alexis Kohler et ses casseroles sonnantes et trébuchantes ; ou comment aller du secrétariat général de Macron à la direction de la Société générale, sans passer par la case « commission d'enquête du sénat ». En ce moment, en Belgique, il y a Didier Reynders, ancien commissaire d'Ursula von der Leyen, qui a trouvé le moyen original de s'enrichir à l'aide de billets de loterie. Il y a le premier ministre d'extrême-Flandre qui va verser une larme à Boutcha tout en trouvant bien sympathique ce Monsieur Netanyahou. Ce même premier ministre d'extrême-Flandre, qui a décidément le cœur sur le main, offre le milliard à Kiev pour autant que Kiev signe des contrats avec les sociétés privées de son plat pays : ou comment subventionner le privé avec les impôts des contribuables en se donnant un air de philanthrope.
Ceux-là, ce sont des épées, des cadors, des pointures, ce sont les requins de l'espèce, le haut de la chaîne alimentaire. Je vais simplement vous parler, à la demande de vox populi donc, du menu fretin, de la politicienne lambda, telle que chacun peut la croiser là où il vote, et comme il en existe tant. Celle-ci sévit aux trois frontières, là où Belgique, France et Luxembourg s'abordent, se rejoignent. Il y a là, côté belge, une ancienne cité industrielle, reconvertie malgré elle dans le trafic de drogues et les marchands de sommeil. Cette commune de près de 20.000 habitants est celle de Véronique Biordi. Première échevine (1ère adjointe, en France) il y a encore quelques mois, bourgmestre (maire) auparavant, conseillère provinciale encore plus tôt et même, brièvement députée, le temps d'un remplacement. Et l'on vient d'apprendre qu'un avenir encore plus fructueux l'attend désormais.
Véronique Biordi a longtemps formé un duo très italien avec le directeur général de la ville, Tomaso Antonacci : la politicienne qui papillonne de tous côtés et le fonctionnaire qui tire les ficelles dans la coulisse. Un duo incapable de gérer une ville, trouvant plutôt sa jouissance dans la manipulation du personnel municipal et les coups fourrés politiciens. Un duo rompu il y a quelques années, le DG étant allé sévir dans une autre commune, en tant que directeur financier (Florenville). Les deux personnages se sont retrouvés impliqués au fil des années dans plusieurs affaires dont la justice a eu à connaître.
Véronique Biordi a une conception personnelle de la chose publique. Elle appréhende le monde sous la forme des relations interpersonnelles, et la politique sous la forme du clientélisme. Elle appartient à ces politiciens qui ne font pas la distinction entre leur vie personnelle et leur mandat électoral. L'hôtel de ville, c'est chez elle. Les fonctionnaires, c'est en quelque sorte son personnel. Comme au temps des seigneurs et des valets. Ajoutons à cela que Véronique Biordi est caractérielle. Elle a régulièrement besoin de passer ses nerfs sur quelqu'un et, dans ces moments-là, un fonctionnaire est bien utile. Sans compter qu'elle a ses têtes. Les fonctionnaires qui ont un parent dans un parti politique autre que le sien sont avertis qu'elle entend leur pourrir l'existence. Au point que les employés l'ont baptisée « Triste sire », du nom du serpent venimeux, dans le Robin des Bois de Walt Disney. Au point aussi qu'elle a fait fuir une grande partie du personnel municipal, qui est allé chercher du travail ailleurs, quand il ne tombait pas malade.
Dernièrement, suite à un changement d'alliance politique, Véronique Biordi a perdu son poste et le salaire qui l'accompagne. Qu'à cela ne tienne, le parti vient de la recaser ailleurs. Au terme d'une discrète tambouille dont il a le secret. Il l'a désignée, il y a quelques jours, pour prendre la présidence d'une intercommunale économique (Idelux). Question salaire, elle y gagne : 15.000 euros mensuels. Les compétences, elles, ne suivent pas. Elle n'avait déjà pas le niveau pour ses fonctions précédentes, elle l'a encore moins pour celle-ci. À sa décharge, il faut dire que ses collègues politiciens sont logés à la même enseigne. Aucun n'a inventé la poudre, ni le fil à couper le beurre. Ce n'est pas leur but. Le parti, c'est le moyen qu'ont trouvé les incompétents pour s'enrichir au détriment de la collectivité. Et ils appellent ça la démocratie. Alors qu'en fait, c'est juste du parasitisme.

10 avril 2025

SOCIÉTÉ DE CONSOMMATION

Jean-Claude Delhez

-10/4/2025- « Le rose qu'on nous propose. D'avoir des quantités de choses. Qui donnent envie d'autre chose ». Où que l'on aille en Occident, et même au-delà maintenant, sur une partie notable de la planète, c'est un seul et unique modèle de société qui s'impose à tous, partout où il peut. Déférence gardée envers Alain Souchon ou Georges Perec, le modèle se veut discret, on n'en entend guère parler. Nous en faisons partie, de cette société de consommation, sans vraiment le savoir. Le socle sociétal ne fait pas débat, n'est pas ouvert à la réflexion, à la discussion. Alors qu'il formate l'économie, l'écologie, la philosophie et même la psychologie de la société. Alors qu'il installe un lien de dépendance entre l'homme et les biens qui relève presque de l'assuétude. Un lien qui fait de l'ombre à l'humain, au social, au vivant. Une fuite en avant matérialiste, les yeux bandés.

6 avril 2025

HYPOCRISIE EUROPÉENNE

Jean-Claude Delhez

-6/4/2025- Pour sa première sortie hors d'Israël depuis le mandat d'arrêt émis contre lui, où Benjamin Netanyahou est-il allé ? Aux USA d'abord, qui ne reconnaissent pas la Cour pénale internationale. En Europe ensuite. Dans la Hongrie de Viktor Orban, qui s'est retirée juste à temps de la Cour pénale, pour ne pas exécuter le mandat d'arrêt.
Cette visite en Hongrie a aussitôt été critiquée par l'Allemagne. C'est l'hôpital qui se moque de la charité. Aujourd'hui, tout le monde a sans doute oublié l'une des premières déclarations du nouveau chancelier allemand, Friedrich Merz. Il y a quelques semaines, alors qu'il aurait pu s'exprimer sur quantité de sujets qui concernent immédiatement l'Allemagne, comme l'économie, la défense ou l'Europe, il a choisi d'annoncer que Berlin n'exécuterait pas le mandat d'arrêt de la Cour internationale contre... Benjamin Netanyahou. Quant à la France, quelques mois plus tôt, elle a laissé subsister un doute sur le sujet. Ce qui signifie qu'elle ne l'exécutera pas non plus, ce mandat d'arrêt, mais qu'elle ne veut pas le dire franchement.
Depuis quelques semaines, Netanyahou a relancé la guerre tous azimuts, rompant les différentes trêves qu'il avait signées : bombardements sur Gaza, sur le Liban, sur la Syrie... Le politicien européen, qui aime à se draper dans la morale, est prompt à s'offusquer au moindre bombardement dans l'est de l'Europe, aux questions de frontières, de souveraineté et de droit international. Mais dès que l'on glisse un peu plus au sud, vers la Méditerranée, il se fait bien plus souple et discret. Il évite de crier au scandale, à la boucherie, au massacre. Bientôt 100.000 morts (décompte britannique), dont 70% de femmes et d'enfants (décompte de l'ONU). Ciblage systématique des hôpitaux, des écoles, des journalistes et des travailleurs humanitaires. Une paille. On ne va pas se fâcher avec Benjamin pour si peu.
Depuis deux mois, les politiciens européens n'ont qu'un mot à la bouche : réarmement. Au point d'angoisser leur population. Le réarmement, il a bien lieu, très concrètement, mais pas en Europe, au Proche-Orient. Netanyahou ne cesse de recevoir un flot continu d'armes et de munitions, qui lui permettent de poursuivre indéfiniment la guerre. Au point qu'il faut un pont aérien pour livrer tous ces équipements. Pour leur grande majorité, ils viennent des USA, en quantités également importantes que le président étasunien soit démocrate ou républicain. D'autres viennent d'Europe, d'Allemagne, de France, du Royaume-Uni ou de Belgique. Mais ce réarmement-là, le politicien européen n'en parle jamais. Ou presque. Hier, le ministre britannique des Affaires étrangères a suspendu les livraisons d'armes britanniques à Israël.

2 avril 2025

EUROPE : BIDOUILLAGES ÉLECTORAUX

Jean-Claude Delhez

-2/4/2025- Connaissez-vous l'entrefilet ? C'est un petit article de journal, quelques lignes seulement, exilé loin, en bas de page. Il contient une information secondaire, d'un médiocre intérêt, qu'on ne souhaite pas développer. C'est donc au sein d'un entrefilet que j'ai trouvé la nouvelle suivante : « Le parlement estonien a donné hier son feu vert à un projet interdisant aux citoyens non-européens de participer aux élections locales, une mesure qui vise en particulier la forte minorité russe ». Ce projet entend retirer le droit de vote à 80.000 habitants de nationalité russe.
Que font ces Russes en Estonie ? C'est le moment d'éclairer une situation que tout le monde ne maîtrise pas. L'Estonie est un État balte, au même titre que la Lettonie et la Lituanie. Ces trois petits pays du nord-est de l'Europe bordent la mer Baltique (d'où leur nom) et sont frontaliers de la Russie. Ils sont membres de l'Union européenne comme de l'OTAN. Dans chacun de ces pays vit une nombreuse minorité russophone : plus d'un million de personnes au total. Certains de ces Russes vivent là depuis toujours, à la frontière avec la Russie, d'autres sont venus à l'époque de l'Union soviétique puisque les pays baltes faisaient partie de l'URSS jusqu'en 1991.
Parmi ces russophones, certains ont la nationalité balte, d'autres sont demeurés russes. Ce sont ces derniers que l'Estonie veut exclure des élections locales (sachant qu'ils sont déjà exclus des autres scrutins). Cette mesure succède à une autre, prise l'an dernier, dans le pays voisin, la Lettonie. En 2024, la Lettonie a imposé à ses habitants russophones un examen de langue lettone. Qui ne le réussit pas est menacé d'être expulsé de chez lui et envoyé en Russie.
Il est à noter que les minorités russophones des États baltes n'ont jamais créé de problèmes dans leurs pays respectifs. Il est à noter aussi que l'écrasante majorité de ces gens sont natifs des États baltes, n'ont jamais vécu ailleurs, y ont leur travail, leur famille et, pour une partie d'entre eux, peuplent depuis toujours les régions orientales de ces États.
Nous voici en présence de pays de l'Union européenne qui adoptent des mesures discriminatoires à l'encontre d'un pan important de leur population, en sorte de leur ôter leurs droits politiques ou de les chasser de chez eux. Pourquoi ? Parce que le russe est leur langue maternelle.
C'est un exemple parmi d'autres des manœuvres européennes à l'encontre des droits politiques des populations, sous ce même prétexte de russophobie. Ainsi l'Europe a-t-elle soutenu dernièrement l'élection présidentielle en Moldavie qui a permis, de justesse, la victoire de la candidate pro-européenne. Comment ce résultat a-t-il été possible ? En empêchant la grande majorité des citoyens moldaves résidant en Russie (plusieurs centaines de milliers) de voter. L'hiver dernier, l'Union européenne a fait pression pendant des mois sur la Géorgie, en vue de faire tomber le gouvernement de ce pays du Caucase Pourquoi ? Parce que Bruxelles jugeait ce gouvernement trop favorable à la Russie. Elle n'en est pas à son coup d'essai. L'un d'entre vous a relayé, il y a quelques jours, un article intéressant sur les opérations spéciales dans cette région. Parmi elles, l'emploi de la Géorgie, il y a pas mal d'années, par l'Occident, comme pays de transit pour livrer secrètement des armes jusqu'en Tchétchénie, afin d'y alimenter la guerre contre la Russie. Un autre d'entre vous s'est exprimé dernièrement sur un autre pays de l'est de l'Europe, la Roumanie, expliquant que la France s'immiscait dans les élections locales en intervenant auprès de la cour constitutionnelle roumaine.
J'attire votre attention sur un dernier point. Les médias occidentaux regorgent de discours affirmant, depuis plusieurs années, la manipulation des élections européennes par la Russie. Jusqu'ici, malgré ce flot d'informations, je n'ai jamais vu comment se concrétisait cette supposée influence russe sur les élections, sur la constitution des pouvoirs politiques en Europe (qui sont plus russophobes les uns que les autres). Dans le même temps, les manipulations électorales européennes dans l'est du continent sont tenues sous silence ou réduites à l'entrefilet.

28 mars 2025

LES CORROMPUS À L'EUROPE

Jean-Claude Delhez

-28/3/2025- La Justice belge vient d'ouvrir une enquête pour soupçons de corruption sur une quinzaine de députés du parlement européen. Ils auraient perçu des pots-de-vin de la société chinoise Huawei. Cette affaire fait suite à une autre enquête, plus ancienne, le Qatargate, impliquant là aussi des députés européens, au profit de l'émirat du Qatar cette fois.
Et c'est juste le moment que choisit la commission européenne pour augmenter ses salaires. Selon le journal allemand Bild, c'est la 7e fois depuis 3 ans que les salaires de la commission sont majorés. Ce qui porte la rémunération de la présidente de la commission, Ursula von der Leyen, à 35.000 euros mensuels, et celle de chacun des commissaires à 28.000 euros.
Parmi ces commissaires, un nom que j'ai déjà évoqué et qui permet de comprendre la logique de nomination de ces gens. Stéphane Séjourné est militant du parti d'Emmanuel Macron et conjoint pacsé de Gabriel Attal pendant 5 ans. C'est ainsi qu'il devient ministre des Affaires étrangères françaises, dans le gouvernement Attal, pendant 8 mois de l'année 2024. Une fonction dans laquelle il est totalement transparent, sauf à exhiber ses lacunes en langue maternelle. Puis, il y a quelques mois, Macron le case comme l'unique Français dans la nouvelle commission européenne, la commission von der Leyen 2. Qu'y fait-il ? Commissaire à l'industrie et aux PME. Quel rapport avec les Affaires étrangères ? Aucun.
Ce cas, parmi d'autres, illustre l'une des principales raisons d'être des partis politiques : offrir à leurs membres de faire carrière aux frais du contribuable. L'Europe a d'ailleurs eu longtemps la réputation d'être l'endroit où il ne se passait pas grand-chose et où les partis politiques nationaux pouvaient recaser un certain nombre des leurs afin qu'ils y bénéficient de salaires plantureux. Vous noterez en passant que ces mêmes partis, notamment celui de M. Séjourné, aiment à stigmatiser les assistés, les pauvres qui bénéficient d'aides publiques. Alors qu'eux-mêmes vivent des impôts des citoyens, sur base de compétences qu'on peine à discerner, et à un niveau de richesse et d'avantages en tous genres incomparable.
Vous noterez aussi que les membres de la commission européenne ne sont pas élus. Ils sont nommés. Nommés par les pouvoirs politiques de leurs pays, au terme de discrètes négociations de boutiquiers. C'est un exécutif non élu, qui travaille dans une certaine opacité, et sous l'influence d'une armée de lobbyistes, ce qui a déjà donné lieu à divers scandales.
Les seuls qui sont élus sont les députés. Ce qui n'a aucun intérêt, pour 3 raisons. 1/ Ils ont très peu de pouvoir. 2/ L'élection est une mascarade, l'électeur ne comprenant même pas le mode de fonctionnement de l'institution. 3/ Les deux grands partis de gouvernement européens (droite et gauche) y forment une coalition indéboulonnable en sorte qu'il n'y pas d'alternance, ce qui est malsain par nature.
Les décisions, elles, se prennent au Conseil des ministres et à la commission. Commission où Ursula von der Leyen a été reconduite au terme d'un premier mandat. Pourtant, le bilan de cette dame est loin de lui être favorable. Et des soupçons de corruption pèsent également sur elle. Il y a notamment l'affaire Pfizer, c'est-à-dire les conditions obscures de l'attribution d'un contrat de vaccins anti-covid à l'entreprise pharmaceutique américaine. Il y a aussi l'affaire McKinsey. Avant d'être présidente de la commission européenne, Ursula von der Leyen fut ministre de la Défense en Allemagne. Comme d'autres politiciens en France, en Belgique et ailleurs, von der Leyen a attribué d'onéreux contrats de conseils à la société américaine McKinsey. Une enquête journalistique, en France, a montré comment cette société poussait des politiciens (Macron, en l'occurrence) vers le pouvoir pour en retirer ensuite des avantages financiers. Or, dans le cas d'Ursula von der Leyen, circonstances aggravantes, il se trouve qu'elle était auparavant consultante chez... McKinsey. Et où travaille aujourd'hui son fils ainé, David ? Chez McKinsey aussi.

25 mars 2025

LES CORROMPUS : SUITE

Jean-Claude Delhez

-24/3/2025- Pour changer, voici une histoire franco-belge.
Commençons par la partie française. Plusieurs d'entre vous viennent de relayer un article du Canard Enchaîné : 3 ministres français ont perçu une rémunération pour une formation à laquelle ils n'ont pas participé. Il s'agit d'Aurore Bergé, de Prisca Thévenot et de Jean-Noël Barrot. Je veux attirer votre attention sur le dernier. Jean-Noël Barrot est le ministre des Affaires étrangères. Il est le fils de Jacques Barrot, qui fut lui-même ministre de Jacques Chirac. Voilà une pratique qui est aussi courante en Belgique : on est ministre de père en fils. Comme au bon vieux temps de l'Ancien Régime, des vicomtes et des marquis. Et Jean-Noël Barrot succède au poste de ministre des Affaires étrangères à Stéphane Séjourné, l'ancien petit ami de Gabriel Attal ; Stéphane Séjourné qui ne maîtrisait même pas la langue française, ce qui ne l'a pas empêché d'être recasé à la commission européenne pour 5 ans, avec un joli salaire. Les méthodes ne manquent pas pour faire carrière aux frais du contribuable quand on n'a pas les compétences.
Jean-Noël Barrot, au-delà d'être fils de ministre et impliqué dans l'affaire révélée par le Canard Enchaîné, est aussi celui qui est affecté au mensonge russe. C'est lui qui, chaque semaine, sort une nouvelle histoire, tout juste inventée, pour effrayer la population, pour lui faire croire que le soldat russe piaffe d'impatience à l'idée d'envahir la France, de venir jusque dans vos bras égorger vos fils et vos compagnes. Il est un petit soldat de la manipulation des foules.
Il faut bien comprendre qu'un ministre, qu'un régime représentatif, qui manipule la population, est par le fait anti-démocratique. Pour rappel, un ministre est nommé ; il n'est pas élu. Et il est rémunéré par les impôts. C'est un fonctionnaire, payé par le peuple, au service du peuple. Manipuler la population, ce n'est pas être au service du peuple. Percevoir une rémunération pour une formation à laquelle on n'a pas participé, non plus.
Cette rémunération s'élève à 12.000 euros. Vous me direz, ce n'est pas le bout du monde. Ca dépend pour qui. Pour un chômeur en fin de droit, réduit à 500 euros mensuels, c'est beaucoup 12.000 euros. Cela fait deux années d'indemnités. Or voilà justement qu'au moment même où le Canard révèle cette affaire, on apprend que le gouvernement où siège M. Barrot vient de prendre des mesures à l'encontre des chômeurs. Depuis quelques mois (grâce à M. Attal), les chômeurs en fin de droit doivent prester 15 à 18 heures de travail par semaine pour mériter leurs 500 euros mensuels. Et donc on apprend que le gouvernement vient de prendre des mesures pour sanctionner ceux qui ne rempliraient pas totalement les conditions imposées. Ceux-là seront suspendus d'indemnités.
Heureusement pour M. Barrot, il est à l'abri d'une telle mésaventure. Le ministre vit aussi de l'argent public ; et à un niveau bien supérieur aux 500 euros. Mais, pour lui, pas de contrôle, pas de sanction. Il peut mentir. Il peut faire tout ce qu'il veut. Ou ne rien faire du tout. C'est open bar. De l'intérêt d'être du côté du manche, du pouvoir, de la bourgeoisie.
Pour qui l'ignore, la corruption n'est pas qu'une affaire de ministre. Elle imprègne toute la société. Elle organise notamment l'attribution des emplois. Si vous cherchez un travail, il est préférable d'être copain avec le maire ou le député. Sinon, comme activité, il vous reste chômeur en fin de droit, à 500 euros, sous la menace de sanctions de la part d'un gouvernement qui cultive la corruption, la manipulation et l'incompétence.
La Belgique, maintenant. Un autre d'entre vous a relayé un article du magazine Le Vif concernant le gouvernement belge. Un article qui pointe une palette de ministres qui cumulent. Ils cumulent deux avantages : un logement de fonction et des indemnités de logement. Or, l'un exclut l'autre. Car les indemnités de logement sont destinées à payer les frais pour qui ne dispose pas d'un logement de fonction. Si l'on bénéficie de l'un, on ne peut en même temps bénéficier des autres. Voilà donc une affaire d'enrichissement personnel aux frais du contribuable. Une de plus.
La corruption a ceci de commun avec l'incompétence : elle ne connaît ni limites, ni frontières.

22 mars 2025

FASCISME : DU DISCERNEMENT

Jean-Claude Delhez

- 22/3/2025 - La mode est à voir des fascistes et des régimes fascistes partout, du nazi derrière chaque moustache. Des moralistes, des politiciens, des journalistes appliquent en ce domaine ce qu'ils reprochaient naguère aux réseaux sociaux : caricature, manichéisme, manque de nuance, faiblesse du fond. Il faut que toute chose soit noire ou blanche, Adolf ou Gandhi.
Qu'est-ce que c'est que le fascisme ? Tout d'abord, c'est une idéologie de son temps. Le fascisme nait de la guerre de 14. Il lui emprunte son expression : la violence. La plupart des leaders fascistes ont fait les tranchées : Hitler, Mussolini, Goering, etc. Et la première expression du fascisme, ce sont les milices. Des milices organisées sur le modèle militaire et qui descendent dans la rue faire le coup de poing ou le coup de feu. Des chemises noires, des chemises brunes, et d'autres, dans la plupart des pays d'Europe. Avec un rapport à la violence et à la mort hérité de 14-18.
Puis, le fascisme, c'est une dictature (alors qu'une dictature n'est pas forcément fasciste). C'est donc un régime à parti unique. Les autres partis sont interdits. Si les opposants politiques s'entêtent, ils sont envoyés en prison, dans des camps ou assassinés. Il n'y a pas de presse libre. Les syndicats sont dissous et remplacés par un système corporatiste. Par contre, le système capitaliste (la liberté d'entreprendre) est maintenu ; la bourgeoisie soutient généralement les régimes fascistes parce qu'ils sont anticommunistes.
Le fascisme, c'est aussi le culte de la personnalité, du chef ; c'est l'encadrement des masses, par la propagande d'État, par des organisations de jeunesse ou autres, aussi par une police politique, parfois par certaines avancées sociales ou économiques.
Le fascisme est un nationalisme. Il considère le pays qu'il dirige et sa population comme supérieurs aux autres. Il valorise la force et l'armée. Il se désigne des ennemis, qu'il faut combattre et vaincre. Des ennemis intérieurs, comme des ennemis extérieurs. Ce qui le conduit à des aventures militaires à l'étranger.
Les mots ont un sens. On parle de dictature, de monarchie, de théocratie, d'aristocratie, de cleptocratie, d'oligarchie, de ploutocratie, etc. Mais aujourd'hui, il n'existe aucun régime fasciste. Comme il n'existe aucune véritable démocratie. Il y a des gradations au sein des régimes politiques, qui vont de gris clair à gris foncé, des plus démocratiques (en Scandinavie) aux régimes autoritaires de tous poils qui parsèment la planisphère, la nature du pouvoir étant de glisser toujours vers le plus sombre.

14 mars 2025

LES CORROMPUS

Jean-Claude Delhez

- 14/3/2025 - Tandis que les médias français, fidèles à la voix de leur maître, n'ont que la guerre à la bouche, plusieurs décisions judiciaires sont passées discrètement dans l'actualité récente. Le 5 mars, la Justice a condamné Alain Bauer à 12 mois de prison avec sursis et 375.000 euros d'amende, Augustin de Ramonet à 8 mois de prison avec sursis et 200.000 euros d'amende, Laurent Vigier à 6 mois de prison avec sursis et 30.000 euros d'amende, Jean-Pierre Jouyet à 30.000 euros d'amende, Christian de Bongain, alias Xavier Raufer, à 30.000 euros d'amende.
Pourquoi ? Pour favoritisme dans les marchés publics, une affaire dénoncée il y a déjà 11 ans par Mediapart. Il s'agit de contrats financés par des fonds publics et attribués par favoritisme à Alain Bauer par les autres condamnés. Alain Bauer est le criminologue bien connu par son omniprésence sur les chaînes de télévision de l'audiovisuel public. Il en va de même pour Xavier Raufer. Augustin de Ramonet était le directeur d'Aéroports de Paris. Il dirigeait également, avec Jouyet et Vigier, la Caisse des Dépôts et Consignations qui est, d'une certaine manière, la banque de l'Etat. Tous ces gens ont cumulé, au fil de leur carrière, de hautes responsabilités dans la fonction publique, des intérêts dans des sociétés privées, des liens avec les partis politiques et avec la franc-maçonnerie.
Deux jours après cette sentence, ce 7 mars, la Justice condamnait Bernard Squarcini à 4 ans de prison dont 2 ans fermes et une amende de 200.000 euros, pour trafic d'influence au profit de la société LVMH, propriétaire du milliardaire Bernard Arnault. En l'occurrence, Squarcini avait organisé l'espionnage d'un magazine et d'un député d'opposition. Bernard Squarcini est l'ancien directeur de la DST et de la DCRI, c'est-à-dire du service de contre-espionnage français.
Pour rappel, une enquête est toujours en cours concernant le philosophe Bernard-Henri Lévy, soupçonné d'avoir usé de sa fonction de directeur du comité de surveillance de la chaîne Arte pour en obtenir des financements en faveur de ses propres documentaires.
C'est étrange cette propension à s'enrichir illégalement en puisant dans l'argent public chez des gens qui font profession de combattre le crime, de gérer les deniers de l'Etat et de faire la morale au reste du monde.



11 mars 2025

LA FICTION MOLDAVE

Jean-Claude Delhez

- 10/3/2025 - Depuis 3 ans, le pouvoir politico-médiatique nous répète que la Russie ambitionne d'envahir d'autres pays que l'Ukraine. Certains prétendent même qu'elle veut engloutir l'Europe entière. Beaucoup désignent nommément, aujourd'hui encore, les futures victimes de l'impérialisme russe. Le pays le plus souvent cité ? La Moldavie.
La Moldavie est une petite république coincée entre l'Ukraine et la Roumanie, proche de la mer Noire. La voie directe pour l'atteindre, à partir du front russe, passe par les villes ukrainiennes de Kherson et d'Odessa. Je voudrais, à ce sujet, vous rappeler un événement qui s'est déroulé le 19 octobre 2022, à Kherson justement.
Quand la Russie envahit l'Ukraine, fin février 2022, son armée occupe en quelques jours toute la rive sud du Dniepr, jusqu'à la centrale nucléaire de Zaporija et au barrage hydroélectrique de Khakovka. Elle s'empare également de la ville de Kherson, capitale de province, ainsi que de la campagne qui l'entoure, située de l'autre côté du Dniepr. Puis le front se stabilise. Aujourd'hui encore, il longe le cours du Dniepr sur plusieurs centaines de kilomètres.
Mais, pendant quelques mois, la Russie a disposé de ce que les militaires nomment une tête de pont. Une tête de pont c'est une poche de terrain, de territoire, située au-delà d'un fleuve. C'est une position qui a son importance. En effet, un fleuve est un obstacle. C'est une large tranchée remplie d'eau. Une position défensive idéale. Qui tenterait de le franchir sous le feu de l'ennemi risquerait de subir de lourdes pertes. Par contre, s'il dispose d'une tête de pont sur l'autre rive, il peut attaquer sans avoir à franchir le fleuve.
Deux exemples historiques. En 1944, les Britanniques lancent une offensive contre les Allemands dans les Pays-Bas. Pour s'assurer la possession des ponts sur la Meuse et le Rhin, ils parachutent plusieurs divisions derrière les lignes allemandes. Ils bénéficient ainsi d'une tête de pont à Arnhem. Les Allemands doivent mobiliser plusieurs divisions pour les en repousser et reprendre le contrôle du fleuve. En mai 1940, envahissant la France, l'armée allemande vient longer le cours de la Somme. Elle en profite pour s'emparer de plusieurs têtes de pont au sud du fleuve (Péronne, Amiens...). Dès lors, lorsqu'elle lance son offensive finale, en juin, l'attaque démarre de ces têtes de pont afin de conduire la France à cesser le combat quelques semaines plus tard.
Et donc, en mars 2022, la Russie s'était ménagé une tête de pont au-delà du Dniepr, à hauteur de Kherson. A partir de cette tête de pont, l'armée russe aurait pu attaquer en direction de la grande ville d'Odessa, peuplée partiellement de russophones. Et au-delà d'Odessa, voici la frontière moldave. Or, sept mois plus tard, l'armée russe évacue toute la tête de pont de Kherson, repasse le Dniepr et fait sauter les ponts. Elle s'installe en défensive sur la rive sud du Dniepr, position qu'elle occupe toujours actuellement.
N'importe quel officier vous dira qu'une armée qui prend ses quartiers le long d'un fleuve se met en position défensive et témoigne d'une volonté de ne pas aller au-delà. Le même officier vous dira que c'est encore plus flagrant lorsqu'elle abandonne une tête de pont. La tête de pont, c'était le tremplin pour lancer une offensive. L'abandonner c'est refuser d'aller plus loin. C'est aussi se barricader derrière un fleuve pour tenir le terrain conquis.
Ainsi donc, depuis deux ans et demi, l'armée russe s'est mise en position de ne menacer ni le sud de l'Ukraine, ni la Moldavie, ni la Roumanie et encore moins les pays situés plus à l'ouest. Continuer de prétendre, depuis lors, que la Russie ambitionne d'envahir la Moldavie ou d'autres Etats est un mensonge de plus dans la déferlante de la propagande européenne.

9 mars 2025

CONSTRUIS TOI-MÊME TA PROPAGANDE

Jean-Claude Delhez

- 8/3/2025 - Tu es journaliste en herbe et tu veux réussir dans la vie ? Le pouvoir a besoin de toi ! Il va te falloir présenter une information en sorte que ton public comprenne bien qui sont les bons et qui sont les mauvais, indépendamment de la réalité. Cette compréhension doit être telle qu'elle te motive ensuite à accepter les politiques menées par le pouvoir et qu'elle évoque en toi une image positive de ce pouvoir, en sorte de le conforter là où il est.
Exemple : un bombardement dans l'est de l'Europe. Des bombardements, il y en a tout le temps. Le front fait 1.000 km, il est truffé d'artillerie, ça tombe comme à Gravelotte. Ce n'est pourtant pas le bon endroit à choisir. Là ce sont des militaires qui combattent, on s'attend à ce qu'ils soient bombardés. Il faut attendrir le public et l'indigner. C'est de victimes civiles dont tu as besoin. Alors, bien sûr, c'est infiniment plus rare que les victimes militaires. Mais il y en a quand même. Des projectiles tombent sur les villes de l'arrière ; c'est là qu'il faut aller. Pourquoi des projectiles sur les villes ? Parce qu'il y a des casernes, des arsenaux, des postes de commandement, des usines d'armement, des infrastructures en tous genres. Mais ça, il ne faut pas en parler. Il ne faut parler que des victimes civiles. Car, dans un bombardement, il arrive qu'un projectile rate sa cible, que la DCA le dévie ou qu'un tir de DCA retombe sur sa propre population. Mais ça, il ne faut pas le dire non plus. Il faut affirmer que l'ennemi cible volontairement les populations civiles. L'ennemi est un barbare, sinon ce ne serait pas l'ennemi.
Et là, il y a matière à faire un beau reportage avec un immeuble résidentiel qui brûle, des pompiers qui s'acharnent à l'éteindre, et des victimes. Il est toujours bien de recueillir le témoignage d'une femme en pleurs. Voilà qui dit bien au public qui sont les agresseurs et qui sont les victimes ; et voilà qui parle à l'émotion, provoque de l'empathie pour la victime et de l'indignation ou de la haine vis-à-vis de l'agresseur.
Attention, jeune scribouillard, ce reportage est à faire du côté de nos alliés. Car il tombe aussi des projectiles sur les villes de l'ennemi. Il y a aussi des victimes civiles. Il y a aussi des femmes qui pleurent. Ne te trompe pas de côté. Ceux-là, il ne faut surtout pas les montrer, sinon tu vas foutre tout en l'air. Les victimes doivent toujours être dans le camp des bons, et les agresseurs dans le camp des mauvais. Ne va pas éveiller le doute dans l'esprit de ton public, malheureux, tu vas ruiner ta carrière, tu finiras affecté à la rubrique des chiens écrasés dans un journal de province.
Pour te faire une idée pratique de ta mission, tu trouveras des exemples sur Euronews, dans la série des bombardements, à peu près chaque semaine depuis trois ans.
Le mois prochain, 2e leçon (un peu plus compliquée) : à partir d'un communiqué officiel de 30 lignes diffusé par l'ennemi, comment le ramener à 4 lignes, en découpant et recollant des morceaux dans un ordre choisi en sorte de lui faire dire ce que l'on souhaite.
Et surtout, surtout, ne pas oublier la consigne de base : Qui n'est pas avec nous est contre nous. Toute critique est forcément la propagande de l'ennemi. Son auteur est donc un ennemi de l'intérieur. Et comme l'ennemi de l'extérieur, c'est un barbare, un assassin de vieilles dames en pleurs. Ceux qui l'écoutent en sont complices Honte sur eux ! Maintenant, répète après moi : Il n'y a qu'un pouvoir, un chef, une pensée... ; un pouvoir, un chef, une pensée... »
(NB : Le texte d'illustration, ci-dessous, est d'Arno Klarsfeld, fils des chasseurs de nazis Serge et Beate Klarsfeld, et il s'adresse à une chaîne de télévision française qui peut être, au choix, LCI, Arte ou France 5, tant les menteurs sont légions dans les médias hexagonaux).