Gabriel Nerciat
Décidément, cette guerre en Ukraine n'a pas fini de réserver des surprises.
Il aura suffi, quand on s'y attendait le moins, de deux Polonais tués près de la frontière par une arme anti-missile ukrainienne puis d'un mensonge énorme et pitoyable proféré par Zelensky (mais, après tout, pas plus énorme ni plus pitoyable que tous ceux accumulés par le pouvoir de Kiev depuis le mois de février ou même depuis le coup d'État ukronazi de la place Maïdan en 2014) pour que soudain tout craque et lentement se délite ou se renverse.
Tout le monde peut voir enfin et surtout dire que le Churchill de bazar et de music-hall fabriqué par la propagande occidentale depuis dix mois n'est rien de plus qu'un minable escroc doublé d'un sinistre pantin, dont les maîtres s'apprêtent à couper sans ménagement les fils pour le pendre à l'un d'entre eux.
J'ai trop attendu ce moment pour bouder mon plaisir, mais j'avoue que malgré tout je ne sais trop quoi en penser exactement.
Y a-t-il déjà des négociations de paix entamées secrètement entre Washington et Moscou, dans le dos de Zelensky ? Si oui, sur quelles bases, et depuis combien de temps ?
Le déconcertant retrait de l'armée russe de Kherson, que ne nécessitait aucun revers stratégique, a-t-il un lien avec elles ? La défaite contenue (et comme toujours vaguement frauduleuse) des démocrates aux élections législatives de mi-mandat aussi ?
Le Pentagone, qui a fait savoir publiquement par une intervention sidérante du général Milley que Kiev ne serait pas en mesure de vaincre militairement les armées de Poutine, a-t-il fini par l'emporter sur les faucons et les néo-cons fanatisés et irresponsables du Département d'État ?
Biden et ses conseillers, lâchés par leurs plus proches alliés et ouvertement nargués par les communistes chinois, ont-ils enfin compris sur quel type d'abîme ils étaient en train de faire danser l'économie mondiale et la leur propre ?
Trop tôt pour le savoir encore, mais j'ai dit assez souvent ici, sous les moqueries et les remarques acerbes des partisans de l'OTAN, que les nationalistes ukrainiens connaîtraient au final le même sort que les sud-Vietnamiens du général Diêm, l'alliance du Nord des tribus tadjiks du commandant Massoud ou les partisans kurdes des YPG anarcho-marxistes de Syrie pour m'étonner de la brusquerie de ces revirements américains. Contrairement aux Russes, ces derniers lâchent toujours leurs alliés, après les avoir utilisés et exploités jusqu'à la corde.
C'est surtout le silence des Russes à vrai dire qui ne laisse pas d'intriguer.
À l'inverse du pétomane kiévien, le président de toutes les Russies ne parle pas pour ne rien dire, mais quand il ne dit rien du tout il semble encore plus omniprésent que lorsqu'il annonçait depuis la salle Saint-Georges du Kremlin la nouvelle donne de la révolution géopolitique en cours.
L'Ukraine, cette comédie tragique au nom de marche d'escalier qui débouche sur un plafond éventré au-dessus du vide, cette grosse Belgique slave et risible minée par le ressentiment et le narcissisme des puissances frelatées, va maintenant connaître, sous les rigueurs du froid de novembre et de décembre, l'hallali ultime destiné aux dupes et aux forbans.
Inutile de nous faire pleurer. L'Europe est déjà bien trop heureuse de se suicider et de se complaire dans l'avilissement spectral à quoi nous vouent ses dirigeants pour qu'on prenne en pitié deux secondes les sicaires de cette nation avortée désormais crucifiée (mais pas au sens de Colosimo) aux nécessités du réalisme politique.
Mourir à cause de Badinter, Delors, von der Leyen ou Macron n'est déjà pas très glorieux, mais sombrer dans l'anéantissement afin de rendre le Donbass à des mercenaires et des voyous qui ne nous sont rigoureusement rien aurait été pire que tout.
Zelensky n'est pas un très bon acteur, mais on va voir la tête qu'il fait pendant que ses protecteurs démembrent son pays et le pouvoir dont il dispose encore. Sûr que le spectacle, quand même, vaudra son prix.