Nico Naf
Vous pensiez avoir tout vu avec Emmanuel Macron : réformes de l’assurance chômage pour abaisser les indemnités des demandeurs d’emploi et conditionnement du RSA à des activités professionnelles. Non, y a encore pire. Le gouvernement envisage de mettre en place une loi anti-squat en vue d’accélérer les expulsions des locataires en difficultés.
Bien entendu, il s’agit de briser les malentendus, il faut différencier les squatteurs qui débarquent dans une maison ou un appartement inoccupés et les locataires qui se retrouvent en difficulté et n’arrivent plus à payer leurs loyers et charges. Pour les squatteurs, il suffirait de renforcer les pouvoirs du préfet en la matière pour accélérer les expulsions. Il faut aussi rappeler que les squats sont des cas très rares (170 en 2021) mais largement (trop ?) médiatisés.
Mais ici, il ne s’agit pas tant de s’attaquer aux squatteurs mais de s’en prendre aux locataires en difficulté, de plus en plus nombreux, qui n’arrivent plus à payer, en accélérant les expulsions locatives. La loi s’attaque aux occupants sans droit, ni titre donc également à ceux qui ont mis fin à leur bail et n’arrivent pas à trouver un logement, aux propriétaires qui ne pourraient plus payer leurs crédits immobiliers et même à ceux qui ont été victimes de marchands de sommeil.
Avec l’inflation qui semble partie pour durer, le gouvernement va durcir les sanctions contre les impayés de loyer et faciliter les expulsions. Si on estime à 6 millions le nombre de ménages en difficultés pour payer leurs loyers, plus de 500 000 ménages ont déjà cessé de payer leur loyer. Cette loi pourrait donc mettre à la rue environ 1 million de personnes supplémentaires. Le 115 étant déjà débordé ne pourra jamais faire face à tant de situations. Cette loi risque même de créer de nouveaux squats car les personnes prendront le risque d’occuper des propriétés privées ou des bâtiments publics plutôt que de dormir à la rue.
4 millions de personnes mal-logées, 2 millions demandeurs de logement, 300 000 SDF, 42 000 enfants sont sans domicile. Et le gouvernement, au lieu de trouver des solutions à ce problème, veut désormais criminaliser les sans-abris.
Nombre de personnes sont en attente d’un DALO (droit au logement opposable) ou d’un contingent préfectoral en vue d’obtenir un logement social ; les temps d’attente sont très longs, parfois des mois à patienter dans des centres d’hébergement quand ce n’est pas entassés dans des hôtels Formule 1 minables.
Emmanuel Macron avait déjà donné un premier signal en baissant les APL de 5 euros mais il a décidé d’aller au bout de sa logique. Comme avec le chômage ou les minima sociaux, le problème ne vient pas du mal-logement, il vient des locataires eux-mêmes qui n’ont qu’à se démerder pour payer leur loyer. Pas un mot sur les 3 millions de logements vides dont un million le sont depuis plus d’un an. Pas un mot sur les taudis loués par des marchands de sommeil, indignes pour un être humain. Pas un mot sur les associations et les travailleurs sociaux qui essaient tant bien que mal de trouver des solutions pour éviter ces expulsions et de mettre en place des plans d’apurement. Pire, le gouvernement avait même envisagé de supprimer des places d’hébergement cet hiver avant de se raviser.
Nous sommes revenus à une situation proche de l’hiver 54 lorsque l’Abbé Pierre avait prononcé son fameux discours : « Mes amis, au secours... Une femme vient de mourir gelée, cette nuit à trois heures, sur le trottoir du boulevard Sébastopol, serrant sur elle le papier par lequel, avant-hier, on l'avait expulsée... ».
Les besoins sont gigantesques. Nous pourrions créer au moins 200 000 logements sociaux supplémentaires par an et mettre en œuvre une garantie universelle des loyers afin d’empêcher et de prévenir les expulsions locatives. Mais ce gouvernement a décidé d’en faire autrement. Macron se place du côté des marchés financiers, des patrons de multinationales, des propriétaires immobiliers, du côté des puissants. Après les chômeurs, désormais les locataires et plus tard les allocataires du RSA, Macron a déclaré la guerre aux pauvres au lieu de s’attaquer à la pauvreté. Jamais un président n’aura mené une politique aussi anti-sociale et anti-pauvres.
Honte à ce gouvernement, honte à Macron et à ses sbires. Vous êtes le summum de l’inhumanité.