Yann Bizien
Le titre de cet article d'un grand journal parisien daté de ce Dimanche est intéressant.
Petite définition rapide sur cette notion de « rendre les armes » :
« Accepter et concéder la défaite ou l'échec, abandonner, jeter l'éponge. Avouer son incapacité à résister. S'avouer vaincu. Renoncer à combattre. Capituler lors d'un conflit armé. Reddition, se rendre. Baisser le pavillon. »
Je ne connais pas l'intention de la rédaction de ce journal du Dimanche, ni celle de l'auteur de cet article. Mais elle est chargée de sous-entendus et de sens.
On retrouve deux explications de cette notion de « rendre les armes » dans la littérature : une explication romantique, et une explication militaire.
Sur le plan romantique, d'abord
Connue dans la seconde moitié du XIVème siècle, cette expression de « rendre les armes » a été essentiellement utilisée dans le langage romantique. À l'époque, il était d’usage de comparer les relations amoureuses, et plus principalement l’art de la séduction, à une forme de défi, tel un combat de chevalerie.
Ainsi, quand un séducteur « déposait les armes », c’est qu’il renonçait à sa conquête amoureuse. Il reconnaissait avoir échoué dans ses tentatives de séduction, ses charmes n’étant pas à la hauteur de ses ambitions ou « la belle » était bien trop farouche.
« Sitôt que je la vis, je lui rendis les armes. » (Malherbe)
« À ses premiers regards les cœurs rendent les armes. » (Molière)
« Jean Azévédo se méfiait des femmes qui rendent les armes trop tôt pour que l’assaillant ait le loisir de lever le siège. Il ne redoutait rien autant que la victoire, que le fruit de la victoire. » (François Mauriac, Thérèse Desqueyroux, Grasset, 1927)
Sur le plan militaire, ensuite
« Rendre les armes » serait la conséquence d'une situation dictée par des nécessités et la reconnaissance d'une défaite potentiellement honorable ou humiliante.
Il s'agirait donc du triste sort des vaincus.
« Vous remettez les armes, et vous demandez grâce. » (Massillon)
Pour mémoire, dès l’entrée des troupes allemandes sur le territoire national français, une ordonnance du 4 juillet 1940 interdit la détention des armes :
« Toutes les armes à feu et munitions, grenades à main, explosifs et autres matériels de guerre sont à remettre. La remise doit s’effectuer dans l’espace de 24 heures. Les maires sont tenus pleinement responsables de la mise en exécution. Toute personne possédant des armes ou autres matériels de guerre sera punie de la peine de mort ou de travaux forcés, en cas plus légers de prison. Toute personne commettant des actes de violence, quels qu’ils soient, contre l’armée allemande ou un de ses membres sera punie de mort. »
Compliqué, tout ça. Surtout quand Fénélon disait : « Mettez vos peuples sous les armes. », que La Fontaine ajoutait : « Que ce soir chacun soit en armes. » ou que d'autres pays, y compris à l'est de l'Union européenne, cherchent encore à inscrire ce droit à détenir des armes dans leur Constitution.
Chacun pourra évidemment déduire ce qu'il veut bien de cette récente opération gouvernementale de récupération des armes privées détenues à domicile.
Elle est juste « lourde de sens. »