Gabriel Nerciat
Elle : Quoi, tu as souhaité la bonne année à mon ex ? Non mais ça va pas, la tête ?
Moi : Ben quoi, ce n’est pas parce que vous avez rompu que je dois forcément lui souhaiter malheur.
Elle : Mais c’est un salopard, un vrai connard en plus ! Tu devrais le savoir.
Moi : Tu ne disais pas ça il y a un an.
Elle : Il y a un an, j’étais encore amoureuse. Ce n’est pas la même chose.
Moi : Il fallait te faire vacciner contre l’amour ; c’était à la mode à l’époque.
Elle : Tu parles. A l’époque, j’étais naïve, et il en a profité. Et puis, ne crois pas : c’est un vicieux. Toi aussi, en fait, il se foutait de toi ; il ne pouvait pas te blairer. J’ai tout fait pour ne pas voir ce qui aurait dû me crever les yeux.
Moi : Mais non. Ce que tu aimais alors chez lui, c’est exactement tout ce que tu as appris à détester depuis. Il a modifié tes désirs et tes aversions, justement parce que tes goûts et ton caractère ont changé. Sans doute à cause de lui, certes, mais aussi à cause d’autre chose qu’il ne maîtrisait pas. Tu ne te connaissais pas assez bien, comme nous tous d’ailleurs, ou peut-être que c’est lui qui a fini par te connaître mieux que tu croyais te connaître toi-même.
Elle : Dis tout de suite que je suis une conne.
Moi : Quand il s’agit de nous et de nos sentiments, on est toujours un peu cons : on s’illusionne facilement sur ce que l’on veut ou ne veut pas. D’ailleurs, c’est toi qui l’as largué, non ? Pas l’inverse.
Elle : Il n’aurait plus manqué que ce soit le contraire.
Moi : Eh bien, tu vois, c’est bien la preuve que j’avais plus de raisons de lui souhaiter une bonne année qu’à toi. Pour toi, l’année commence assez bien, en fait. Tu es débarrassée de lui. Lui, c’est moins sûr.
Elle : Le pauvre chou. Tu vas le plaindre, en plus ?
Moi : Non, c’est moi que je vais plaindre. Tu ne m’as même pas souhaité une bonne année.
Elle : Va te faire foutre.