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14 mars 2023

Eric Vial

Chère Cécile Kohler, chère camarade,
 
cela fait 10 mois que tu es emprisonnée dans les geôles iraniennes.
Le motif de ton arrestation avec ton compagnon n’est toujours pas officiellement connu. On nous parle « d'espionnage » et « d’atteinte à la sûreté du pays » mais cela nous paraît tellement stupide…
Tu es prof agrégée de lettres modernes au lycée Les Pierres Vives à Carrières-sur-Seine, syndicaliste en charge des relations internationales à Force Ouvrière ; tu revenais de sept jours de congés en Iran. C’était ton premier voyage en Perse. Tu as été arrêtée à l’aéroport.
Nous avons peu de nouvelles. Apparemment tu as été à l’isolement pendant plusieurs mois. Tu as perdu tes lentilles de vue. Ta maman vient d’envoyer ta paire de lunettes. Elle ne sait pas si tu la recevras.
Nous savons simplement que tu es injustement privée de ta liberté, qu’aucun avocat indépendant ne peut te défendre et que tes droits fondamentaux ne sont pas respectés. Même les visites consulaires sont refusées.
Nous sommes évidemment tous inquiets. À Soultz (Haut-Rhin) dont tu es originaire, mais plus globalement dans toute l’Alsace et dans toute la France. Nous exigeons ta libération et celle de ton compagnon immédiatement et sans condition. Vous n’avez pas à être des otages d’État !
Comme toi j’aime l’Iran, berceau de la civilisation. J’aime son peuple jeune, cultivé, épris de liberté. J’aime la beauté de ses paysages et la bonté de ses habitants.
Mais je hais ce qu’est devenu ce pays dans les mains de ces arriérés islamistes intégristes qui sont dans l’incapacité d’aimer leurs femmes et leurs filles. Ils sont la lie des nations.
Chère Cécile, je te souhaite tout le bonheur du monde. Nous sommes tous avec toi. Ne crains rien : personne ne t’oublie. Nous sommes tous solidaires de ta souffrance et de l’injustice dont tu es la victime.
Tu es notre héroïne.
Je place ici ton portrait ainsi qu’une photo que j’ai prise de l’Hôtel de Ville de Soultz (Haut-Rhin) où je viens de me rendre. La ville affiche son soutien depuis les premiers instants de ta captivité.
Il existe également sur la toile un site de soutien pour t’envoyer des messages.
À très bientôt. - 13/3/2023



13 mars 2023

De la démocratie en général et singulièrement dans la France contemporaine

Denis COLLIN

Nous sommes conviés à défendre la démocratie et « nos valeurs ». Mais il serait bon de savoir ce que ce terme recouvre exactement. Le terme est plébiscité aujourd’hui (mais ce ne fut pas toujours le cas). Mais il recouvre au moins trois acceptions différentes.

La première dit que la démocratie est le pouvoir du peuple, c’est-à-dire le pouvoir de ceux qui participent de la vie de la cité ; on sait que les démocraties antiques ne considéraient comme citoyens qu’une partie restreinte du peuple. Et même chez nous, les femmes furent exclues de la pleine citoyenneté jusqu’à la Libération ! Mais quelle que soit l’extension de la citoyenneté, les citoyens participent tous du pouvoir par le biais des assemblées qui décident des lois et désignent les magistrats chargés de les exécuter. Le modèle de la démocratie était celui d’Athènes à l’époque classique. Les conseils ouvriers, russes, allemands, hongrois, de l’immédiate après première guerre mondiale en sont des exemples.

En second lieu, on nomme démocratie un régime politique dans lequel les représentants du peuple sont élus au suffrage universel et doivent régulièrement rendre compte de leur mandat. Cette démocratie représentative suppose a minima que le pouvoir politique appartient au Parlement. Les expressions « démocratie parlementaire » ou « démocratie représentative » sont des pléonasmes, pour ne rien dire de cette obscure notion de « démocratie participative » qui connut son heure de gloire…

En troisième lieu, on parle de démocratie quand les droits individuels essentiels sont garantis. Il n’y a pas d’esclave, chacun est propriétaire de lui-même, chacun dispose du droit de choisir son emploi, son conjoint, de professer la religion qui lui sied ou de n’en professer aucune, d’exprimer ses opinions, de jouir de ses propriétés légitimement acquises, etc.

Force est de reconnaître que la démocratie en son sens originel n’existe nulle part, à l’exception de la Suisse qui n’est cependant qu’une démocratie semi-directe. On peut admettre que la démocratie directe n’est applicable strictement que dans des petites communautés politiques et non dans les grands États-nations modernes. Nous serions donc condamnés à la démocratie parlementaire, combinée à une échelle plus ou moins large avec le référendum d’initiative populaire.

Ce qui est inquiétant, c’est que l’on voit, un peu partout une formidable régression des droits des parlements au profit des exécutifs de plus en plus concentrés sur une seule personne et au profit d’instances non élues, si typiques de la nouvelle « gouvernance », ainsi la Commission de l’Union européenne. De ce point de vue, la France est une caricature. Le régime créé par un coup d’État en 1958 conférait au président des pouvoirs considérables, quoique le Parlement y gardait quelques prérogatives, dûment encadrées – on a pu parler à propos de ce régime de régime semi-bonapartiste et semi-parlementaire. La chose s’est sérieusement aggravée avec le passage à l’élection du président au suffrage universel qui faisait passer évoluer le régime vers un système « monarchique » plébiscitaire (le modèle étant Napoléon III). Deux éléments venaient tempérer cette évolution dangereuse. Le premier était la possibilité de la « cohabitation » avec une majorité parlementaire opposée au président (ce qui est arrivé en 1986-1988 et en 1997-2002), situation où, de fait, le centre du pouvoir était rééquilibré vers le Parlement. Le deuxième élément non institutionnel était la recherche par de Gaulle d’un lien assuré entre la nation et « l’homme de la nation ». Ainsi de Gaulle mit en jeu son mandat à chaque élection nationale et usa du référendum dont le dernier, celui de 1969, le conduisit à une démission immédiate. Mais après de Gaulle, plus aucun président ne se sentit engagé par le résultat d’une consultation populaire et après la modification constitutionnelle de convenance organisée par Chirac et Jospin en 2002 (réduction du mandat présidentiel à 5 ans et inversion du calendrier électoral) il est devenu presque impossible de fait que le président se trouve face à une majorité parlementaire hostile, la représentation nationale n’étant plus que la représentation du président – surtout avec le mode de scrutin majoritaire.

C’est pourquoi nous ne pouvons pas vraiment dire que la France est une démocratie. C’est plutôt une oligarchie, puisque le pouvoir réel n’est exercé ni par le peuple, ni par les représentants du peuple, mais par une caste sélectionnée par les plus riches, appuyés sur une fraction de l’appareil d’État dont le rôle politique est de plus en plus envahissant.

Évidemment, l’oligarchie est difficilement compatible avec ce que l’on nomme « État de droit », même si cette expression est fort équivoque. Les libertés individuelles, en France comme partout sont de plus en plus restreintes par la surveillance généralisée, dont le Covid a donné un petit avant-goût. Les droits des justiciables sont de moins en moins assurés. Les « Gilets Jaunes » ont payé de leurs yeux et de leurs mains le sens très particulier du droit de manifester dont à fait preuve l’exécutif. L’information est pour l’essentiel sous contrôle entre une radio et télévision d’État de plus en plus calquée sur le modèle RDA d’avant 1989 et les médias privés possédés par une poignée de milliardaires qui, hasard étonnant, sont aussi ceux que l’on a retrouvés dans le « tour de table » où l’actuel président fut choisi comme représentant des oligarques. Même quand l’immense majorité des citoyens refuse la réforme des retraites, le pouvoir dispose de toutes les astuces et toutes les roueries de la constitution pour faire passer sa loi.

Tout naturellement, un tel régime est particulièrement propice à la corruption, au règne du passe-droit, au népotisme et à la protection des copains et des coquins si d’aventure la justice se mêle de leur chercher des poux dans la tonsure. De Benalla à Dupont-Moretti et Kohler, les exemples abondent. Dans un pays même modérément démocratique, le scandale du rachat d’une partie d’Alstom par General Electric aurait dû coûter à l’actuel président une inéligibilité à vie. Mais comme on le sait, il n’en est rien.

Rappelons pour terminer, ce que proposaient les Conventionnels de 1793 : « Quand le gouvernement viole les droits du peuple, l’insurrection est pour le peuple, et pour chaque portion du peuple, le plus sacré des droits et le plus indispensable des devoirs. » (article 35) - 13/3/2023


Réforme des retraites : et si la classe politique avait tout faux ?

Maxime Tandonnet
Publié le 11 mars 2023


Texte ci-dessous : ma position n’est pas de principe contre une réforme. Elle consiste à dire que cette réforme-là relève de l’imposture : son intérêt effectif est, non pas réduit, mais nul, inexistant. Or ce constat est tabou. J’attends toujours qu’une autorité morale ou intellectuelle ou politique ait le courage de le dire. Ils sont en train de déclencher une nouvelle déchirure sociale – alors que la France a tant besoin de stabilité et de concorde – pour du néant. Ensuite, je suis convaincu que dans une vieille nation comme la France, il est monstrueux de réformer contre le pays profond 75% de ses habitants, 90% de ses travailleurs. La France n’appartient pas à une caste déconnectée qui se prétend éclairée et entend faire le bien des gens contre eux-mêmes ; elle appartient à ses habitants. Pour réformer, il faut d’abord écouter, expliquer, convaincre. Sinon, c’est la loi du mépris qui s’impose. Tel est le fond de ma pensée sur tout cela ou plutôt, de ma sensibilité : je ne supporte pas qu’on se moque du monde. Et de tout cœur, je remercie le Figaro Vox de me permettre d’exprimer cette sensibilité.

« Le résultat des élections de 2022 doit impérativement prévaloir sur les sondages et sur "la rue" » : cette affirmation domine le discours officiel, politique et médiatique, pour justifier la volonté du pouvoir actuel et de ses alliés de mener à son terme, quoi qu’il arrive, l’emblématique réforme des retraites. Ainsi, le report à 64 ans du départ de l’âge à la retraite, dérivé de la promesse de campagne de M. Macron de porter cet âge à 65 ans, serait comme gravé dans le marbre. Un tel raisonnement se heurte à l’esprit initial de la Ve République. Dans l’esprit de son fondateur, Charles de Gaulle, l’élection ne valait pas une sorte de chèque en blanc pour les dirigeants politiques, dont la légitimité pour réformer le pays reposait, au-delà du scrutin initial, sur la confiance populaire préservée. D’où les referendums successifs où le Général engageait sa confiance et la poursuite de son mandat. Présider ou gouverner la France contre son gré, sans la confiance et le soutien populaire, était inconcevable à ses yeux.

Les faits lui donnent raison. C’est une erreur profonde de prétendre qu’en élisant le président Macron en 2022, une majorité des Français (globalement) lui a accordé un feu vert pour mettre en œuvre les 65 ou 64 ans. La présidentielle de 2022 s’est déroulée sans véritable campagne, sans le moindre débat de fond, entre les terreurs covidesques et le déclenchement de la guerre d’Ukraine. Le choix de nombreux électeurs de l’actuel président était dominé par la crainte de voir M. Mélenchon ou Mme le Pen parvenir à l’Élysée. Certes à un moment de la campagne, pour couper l’herbe sous le pied de la candidate de droite, le candidat-président a annoncé un report de l’âge de la retraite à 65 ans (tandis que quelques mois auparavant, il fustigeait cette mesure comme hypocrite). Mais il est abusif d’affirmer que les électeurs (dans leur ensemble) avaient cette mesure à l’esprit quand ils ont voté dans un contexte global extrêmement anxiogène. Quant au message principal des législatives qui ont suivi, avec 46% de participation, le refus d’accorder une majorité absolue au chef de l’État manifestait bien au contraire une volonté populaire de ne pas accorder au président un blanc-seing, y compris sur les 65 ans.

La séquence politique actuelle est dramatique pour la démocratie française. La mesure phare des 64 ans est immensément impopulaire et rejetée par les trois quarts des Français et les neuf dixièmes des actifs comme le prouvent toutes les enquêtes d’opinion, confirmant une réalité que chacun peut percevoir dans sa vie quotidienne. Or, sous de mauvais prétextes, la classe dirigeante donne le sentiment de n’en tenir aucun compte. Elle s’enfonce dans une attitude qui manifeste une sorte de fuite dans le mépris et la déconnexion. Pire : dans ce bras de fer entre les élites dirigeantes et le peuple, c’est le peuple qui a raison sur le fond. Les 64 ans ne servent strictement à rien compte tenu de la règle des 43 annuités. Leur unique effet sera d’obliger à travailler plus de 43 ans quelques catégories de travailleurs ayant commencé avant 21 ans donc ayant peu fait d’études (et échappant aux dérogations prévues pour les carrières longues). Le reproche d’inutilité et d’injustice envers cette mesure totémique est avéré. L’image d’une classe politique obtuse, refusant d’écouter le pays, à l’abris de ses palais et engoncée dans l’indifférence pendant que la France populaire s’enfonce dans une nouvelle galère – le blocage de l’économie et des transports – est dévastatrice.

Selon le discours dominant le président « ne pourrait plus gouverner s’il renonçait à cette mesure ». Pourtant, qu’il cède ou non, la confiance, déjà fragile, sera définitivement rompue avec le pays, obérant gravement la suite de son mandat. Et quasiment toute la classe politique sortira perdante de cette épreuve de force entre elle-même et la Nation. Les leaders officiels de la droite LR se sont gravement compromis avec la majorité présidentielle dans une logique d’arrogance au prétexte de coller à un programme qui, à quatre reprises (présidentielles et législatives), a contribué à leur défaite. La Nupes a fait naufrage dans l’outrance. Cette crise sociale a aussi montré les limites de la « dédiabolisation » du RN, avec lequel les syndicats rejettent tout contact, un parti qui ne parviendra jamais à incarner l’apaisement et une réconciliation dont la France a tellement besoin. Dans cette débâcle qui signe peut-être le paroxysme de la décomposition politique et semble ouvrir sur un abîme, seuls les « frondeurs » de la droite LR pourraient éventuellement tirer leur épingle du jeu. Ils sont une vingtaine de la jeune génération LR. Ils ont compris (contrairement aux leaders du parti) qu’au-delà de l’emblématique report à 64 ans (encore une fois inutile et injuste) se jouait un bras de de fer entre les « élites dirigeantes » incarnées par la présidence Macron, et la France populaire, le monde du travail. À condition cependant de ne pas faire naufrage à leur tour dans la mégalomanie, la prétention solitaire et le culte de la personnalité.

https://maximetandonnet.wordpress.com/2023/03/11/reforme-des-retraites-et-si-la-classe-politique-avait-tout-faux-pour-figaro-vox/

La prochaine guerre, au coin du feu ?

Yann Bizien

Madame Ursula von der Leyen serait candidate à la fonction de secrétaire générale de l'OTAN dans le cas ou elle ne serait pas reconduite à la tête de la commission européenne. Elle a d'ailleurs rencontré hier à la maison blanche le vrai patron de l'OTAN, Joe Biden, qui finance le fonctionnement de l’Alliance Atlantique à hauteur de 69%.

Les Américains ont en effet besoin d'un secrétaire général de l'OTAN totalement aligné sur leur obsession d’endiguement de la Chine. Et ils entendent bien utiliser leur bras politico-militaire, l'OTAN, pour cette guerre du siècle.

Joe Biden a probablement l'idée de cautionner la première candidature d'une femme allemande sur ce poste dans le but d'entraîner toute l’Union européenne dans la grande croisade américaine contre la Chine, après leur guerre contre la Russie en Ukraine.

Les peuples occidentaux sont devenus des agents de production et de consommation au service de ceux qui font la guerre en permanence. Ils financent désormais les guerres voulues et conduites à distance par les États-Unis. Ils sont les petits esclaves du train de vie US.

Yann Bizien

Il se dit également que la réforme des retraites serait la contrepartie des arrangements d'Emmanuel Macron avec le patronat et la baisse des impôts sur les entreprises.
Au bout de tout, c'est toujours le peuple français qui trinque. Il paie la facture de la guerre en Ukraine, il finance le train de vie économique et industriel des États-Unis, il subit les exigences normatrices de l'Union européenne, il est trahi par les Anglais en Australie, trahi par l'Allemagne sur les dossiers énergétiques et trompé par un pouvoir qui ment.
Le peuple "trinque". Mais il vote pour son bourreau. Il vote aussi pour des élus qui, une fois au pouvoir, oublient très vite d'où viennent leurs mandats.


Yann Bizien

Chère jeunesse de plus de 18 ans,
Pour qui avez vous voté en avril 2022 ?


Silicon Valley Bank, Silvergate, Signature bank : du rififi chez les bancaires

H16

Voilà, on y est : les premiers effets du resserrement de la politique monétaire de la Federal Reserve se font sentir avec la faillite de la Silicon Valley Bank…

La nouvelle n’a pas eu le temps de faire beaucoup de bruit de ce côté-ci de l’Atlantique, mais on peut raisonnablement estimer que cette faillite pourrait faire parler d’elle dans les prochains jours, notamment si l’on tient compte des ramifications possibles de cette déroute financière.

Dans l’immédiat, la banque californienne, spécialisée dans la bancarisation des start-ups de la Silicon Valley et qui représentait tout de même la 16ème banque aux États-Unis par la taille de ses actifs, a vu ses cours de bourse s’effondrer.


Cet effondrement n’a rien d’étonnant : après une journée de jeudi (8 mars) où la plupart de ses clients se sont rués pour retirer leurs fonds, la banque s’est retrouvée sans liquidités et a été fermée vendredi par l’autorité de régulation bancaire de l’État de Californie qui va maintenant tenter de régler cette situation qu’on imagine complexe pour les millions de clients (particuliers et entreprises) concernés.

Pour résumer, suite à une tentative échouée de levée de fonds lancée par la banque, les investisseurs et les déposants ont réagi à cet échec en commençant à retirer jusqu’à 42 milliards de dollars des dépôts de la banque jeudi dernier, ce qui a provoqué un “bank run” ou panique bancaire.

Silicon Valley Bank (SVB) était en effet très dépendante des taux d’intérêts appliqués par la Fed : spécialisée dans les startups, ses clients étaient généralement d’autant mieux capitalisés que les politiques monétaires accommodantes leur assuraient un flux important d’argent frais. Ces montants étaient investis par SVB dans des titres et obligations de l’État américain (notamment pour des obligations légales), dont la valeur a progressivement diminué à mesure que la politique monétaire s’est faite moins souple et que l’inflation grimpait. D’un côté, les clients de SVB voyaient leurs entrées se tarir, et de l’autre, la valorisation des obligations garantissant les dépôts diminuait ce qui a rapidement conduit la banque à devoir se recapitaliser.

Malheureusement, cette opération a été mal menée : le 8 mars, SVB vend pour 21 milliards d’investissements afin de dégager des liquidités. C’est un échec et ils se retrouvent à devoir emprunter 15 milliards et vendre des actions. Ce n’est pas a priori la débâcle, mais la communication vers la clientèle, purement financière et technique, se résume un peu trop vite à “on n’a plus de liquidités” qui sera rapidement interprété de la pire façon possible.

S’ajoute à cette communication défaillante l’abaissement (pourtant logique, prévisible et mécanique) de la note attribuée à SVB par Moody’s. Là encore, ce n’est pas en soi une catastrophe, mais cela ajoute au tableau, peu reluisant.

Enfin, quelques fonds majeurs, dont celui de Peter Thiel, sentant que les choses pourraient tourner au vinaigre, conseillent dans la foulée à ses clients de retirer leurs fonds de SVB.

L’information, surtout dans la Silicon Valley, voyage vite : ce qui était encore un mouvement peut-être maîtrisable devient alors de la panique et malheureusement, beaucoup des clients de la banque sont des entreprises avec de forts volumes en avoirs (en millions de dollars). Rapidement, les montants sortis sont énormes et bientôt, ils sont effectivement au-dessus des capacités de la banque : suite à cette panique et à la fermeture des bureaux le même jour, la banque se retrouvait vendredi avec un solde de trésorerie négatif d’environ 958 millions de dollars.

Au passage, devra-t-on s’étonner de constater que certains des dirigeants de la banque ont eu la bonne idée de vendre leurs actions avant la débâcle ?


Les jours qui viennent seront maintenant déterminants pour les clients de la SVB : peu pourront espérer récupérer la totalité de leurs fonds. Dans ces clients, quelques noms connus pourraient avoir des difficultés sensibles provoquées par cette faillite rapide.

Les impacts de cette faillite seront de toute façon nombreux : en effet, cette banque n’était pas seulement une banque pour les startups, c’était aussi une banque “retail”, c’est-à-dire pour des clients particuliers de tous types, avec leurs emprunts, leurs comptes courants qui vont donc se retrouver dans des difficultés importantes à partir de lundi (et même avant si l’on en croit certaines vidéos vues sur twitter).


Les comptes clients (particuliers et entreprises) étant fermés, certains salariés ne seront pas payés cette semaine et des pertes d’emploi sont donc à prévoir.

De façon intéressante, le monde de la cryptomonnaie est lui aussi touché par cette faillite puisque SVB conservait une partie des avoirs nécessaires à valoriser le stable-coin USDC (une cryptomonnaie visant la parité avec le dollar). Ainsi, la compagnie cryptomonétaire Circle (cryptomonnaies) est très exposée à cette faillite à hauteur de plus de 3 milliards de dollars…

Or, dans le monde des cryptomonnaies, la faillite de SVB s’ajoute aux difficultés récentes de Silvergate, une autre banque (traditionnelle) américaine directement en faillite suite à la déroute de FTX évoquée précédemment dans ces colonnes.

Du reste, si on ajoute les récentes difficultés de Signature Bank, elle aussi impliquée dans la sécurisation des avoirs de Tether et de USDC, on commence à se douter que l’apurement des délires de FTX ne fait que commencer dans le monde des cryptos.

Bref, on le comprend : à mesure que la Fed relève ses taux, le stress sur les banques locales et régionales se fait de plus en plus fort et les effets de bord, parfois spectaculaires, commencent à se voir. La mer de financements se retire et on commence à voir qui est à poil.


Quelques questions se posent à présent.

D’une part, l’une des principales causes de la crise financière de 2008 fut l’utilisation de facteurs sociaux pour accorder des prêts (à l’époque, il s’agissait de favoriser l’accession à la propriété). Les leçons de 2008 n’ayant pas été tirées, l’histoire se répète. Au-delà de l’impact évident, majeur du relèvement des taux dans les déboires de SVB, on peut aussi se demander dans quelle mesure l’utilisation des critères ESG dans leur gestion des fonds n’a pas joué, par exemple lors de la fixation des prix de ses prêts. Il y a un an, en tout cas, SVB s’engageait à fond(s) (pour 5 milliards de USD) dans les opérations carbone-neutre et autres grigris écolo-bienséants…

D’autre part, alors que les faillites et autres difficultés bancaires s’accumulent à présent de façon visible, quelle va être la position de la Fed ? Persistera-t-elle dans cet assèchement de l’argent facile en conservant des taux élevés pour combattre l’inflation, déclenchant inévitablement d’autres faillites, ou choisira-t-elle le chemin d’un nouvel assouplissement, signant probablement une mise à mort du dollar par noyade à plus ou moins long terme ?

Aucune de ces deux options n’est politiquement aisée mais les deux garantissent clairement des difficultés à venir.

Henrion-Caude, ou le principe de réalité

Pierre Duriot

Le livre d’Alexandra Henrion-Caude se vend comme des petits pains, comme quoi, il y a un décalage total entre le peuple et les élites, ou pseudo-élites, qui n’ont cessé de tourner en ridicule, cette femme scientifique de haut vol, docteur en génétique. Moquée, ostracisée, alors que ses diplômes et ses arguments étaient à écouter, autant, sinon plus, que ceux des médecins de plateaux télévision qui ont, quasiment tous, ce n’est un secret pour personne, touché des sommes rondelettes de la part de laboratoires. Cette intervenante a été qualifiée de « complotiste » et certains ont même émis tout haut la possibilité qu’elle soit devenue folle, qu’elle ait perdu la raison. Se demandant pourquoi une personne adoubée par le système, n’avait pas emboîté le pas du système en question.

Elle est seulement dans la bonne posture scientifique : elle doute. Ce qui devrait aussi être la posture journalistique : le doute. Ni la science, ni le journalisme, ne sont des disciplines exactes et il convient juste de douter. Habituellement, quand tout se passe bien, les scientifiques ne sont pas tous d’accord et les journalistes non plus. Or, pour l’affaire qui nous concerne, ils étaient tous d’accord pour adhérer à un narratif et cela aurait dû suffire, en soi, à faire douter. Pas seulement les scientifiques et les journalistes, mais tout le monde. Il n’y a pas besoin d’être médecin, pour savoir si l’on doit se faire injecter un produit encore expérimental, comme le pensent tous les intervenants, se posant en « sachant » et se donnant pour mission de dire, aux « ignorants », ce qu’ils doivent faire. En principe, quand toute la presse, tous les hommes politiques, tous les « spécialistes », vous répètent la même chose, en boucle, 24h/24h, avec les mêmes mots, les mêmes intonations et la même musique, ça ne peut pas être de la science et face à cela, il aurait convenu de douter. Même en n’étant pas médecin.

Praud, pourtant journaliste de haut vol, n’a pas douté. Il s’est fait vacciner, comme il le dit, a fait vacciner ses enfants et toute sa famille. Et face à Henrion-Caude, il semble perdre plus ou moins ses nerfs, s’affole, pose sa question mais ne la laisse pas répondre. Il n’a rien, ses enfants non plus, alors quoi, qu’est ce qu’elle veut cette généticienne de malheur, avec ses arguments censés et son best-seller ? Elle explique les désordres génétiques possiblement occasionnés par l’ARN. Oui, chez les enfants vaccinés, si la fertilité devait être touchée, on ne va pas le savoir tout de suite. Et si les adultes doivent en faire un cancer, ce sera différé. Mais il y a, en arrière-plan, une mortalité à la hausse, fortement, dans toute l’Europe, aux États-Unis, en Angleterre et en Australie et là, forcément, on se met à avoir la bonne posture : on doute. Mais c’est un peu tard. On pourra toujours accuser le réchauffement climatique, la malbouffe et la pollution, tout cela n’a pas explosé d’un coup. La seule chose tangible qui soit intervenue dans ces pays industrialisés, en dehors de l’air que l’on respire, ce sont bien les massives campagnes de vaccination. Et les pays peu vaccinés serviront de comparatif.

Au RPF, nous ne sommes pas complotistes, nous avons juste douté, depuis le début, devant cette « unanimité » suspecte de la presse. Nous avions préconisé de garder les traitements, qui ont été interdits, de laisser le vaccin aux volontaires et de ne pas l’imposer aux soignants. Tout en étant contre les processus d’enfermement et de privation. En réalité, nous avons toujours préconisé de traiter le Covid comme une grippe annuelle. La plupart des affirmations et des chiffres assénés pendant la pandémie, s’avèrent faux, ou partiellement vrais, les uns après les autres, mais après avoir répété en boucle, sur commande, les médias français ont adopté une autre attitude : ils ne disent plus rien. Et quand Praud, reconnaissons lui ce courage, invite une persona non grata sur le plateau, l’irruption du principe de réalité génère un vent de panique…

Jean-Pierre Luminet

Déclaration ahurissante du secrétaire d’État à la mer. Une collusion de plus entre le gouvernement et les lobbies industriels, ici en l'occurrence ceux de la pêche.

Ici il s'agit bien de permettre le chalutage de fond dans les aires marines protégées, contre l'avis même de la Commission Européenne, dont on ne peut pourtant pas dire qu'elle soit affranchie des lobbies !

Macron et ses ministres-valets ne se cachent même plus, affirmant ouvertement leur vraie nature : destructeurs, froids, déterminés contre vents et marées, et totalement irresponsables.


Ukraine : jusqu’où ira l’OTAN ?

Jean Neige - France-Soir
Publié le 12 mars 2023

Le secrétaire général de l'OTAN, Jens Stoltenberg, le 7 mars dernier à Stockholm (Suède) - JONATHAN NACKSTRAND / AFP

TRIBUNE/OPINION - Où s'arrêtera le "whatever it takes", ce "quoi qu’il en coûte" de Joe Biden et de l’OTAN dans la politique de soutien militaire à l'Ukraine ? De cette question dépend non seulement le sort de l'Ukraine, mais le sort du monde, plus que jamais au bord de la Troisième guerre mondiale.

Le dernier sommet des pays de l’OTAN désireux de soutenir militairement l’Ukraine s’est tenu le 20 janvier sur la base américaine de Ramstein, en Allemagne.  

Après quelques réticences au sujet de la livraison de chars lourds “Léopard 2”, le chancelier allemand Olaf Scholz a cédé aux pressions, notamment celles de la Pologne et des Pays baltes (Estonie, Lettonie et Lituanie), mais aussi celles des Anglo-Saxons.

Il a ainsi autorisé la réexportation vers l’Ukraine de ces chars vendus initialement à d’autres pays. Outre l’Allemagne, au moins 8 pays occidentaux ont promis des “Léopard 2” à l’Ukraine (Pologne, Espagne, Portugal, Pays-Bas, Norvège, Finlande, Grèce, Canada). 

La liste des matériels promis pour 2023 comptait plus de 340 chars au 7 février quand on y ajoutait les Abrams américains, mais aussi les chars de technologie soviétique promis par les Polonais et les Tchèques, et les vieux “Léopard 1”.

À cela s’ajouterait la fourniture par le Maroc à l’Ukraine d’un nombre inconnu de chars de conception soviétique, selon un média algérien. Mais des sources marocaines ont démenti. Le Maroc aurait juste accepté de fournir des pièces détachées. Il est possible que les uns ou les autres jouent sur les mots ici. Quant à l’Espagne, après avoir annoncé l’envoi de 53 chars, elle se limiterait à un nombre entre 6 et 10.

Quoi qu’il en soit des chars marocains, les chars lourds promis par les pays occidentaux s’ajoutent aux 40 chars légers à roue AMX-10 RC, aux 20 véhicules de transport de troupes Bastion et aux 12 canons Caesar supplémentaires que la France s’est engagée à livrer (dès le mois de février pour les AMX-10), ainsi qu’aux centaines de blindés d’infanterie, pièces d’artillerie et autres systèmes d’armes que les Etats-Unis et d’autres pays ont promis.

La liste, qui ne cesse de s’allonger, impressionne. Et ces armements que fournit l’OTAN à l’Ukraine en manque de matériels sont de plus en plus sophistiqués.

Poussée par la dynamique globale, la France réfléchit même à fournir ses propres chars Leclerc, peut-être les meilleurs au monde, fleurons de la technologie militaire française.

À peine les promesses de livraison de chars lourds étaient annoncées que le président Zelensky demandait des avions de chasse, des missiles de longue portée et même des sous-marins.

Comme on ne refuse rien à l’Ukraine, ni à celui qui n’était encore qu’un amuseur public, pour ne pas dire littéralement un bouffon, il y a seulement 4 ans, on se sera pas surpris qu’il obtienne quasiment tout ce qu’il demande, à un moment ou à un autre.

D’ailleurs, Mike Pompeo, ancien directeur de la CIA et ex-Secrétaire d’Etat, assène : “Nous devons faire tout ce que les Ukrainiens nous demandent de faire”.

Et Annalena Baerbock, la ministre allemande des Affaires étrangères, avance que “nous sommes en guerre avec la Russie”.  Et comme pour enfoncer le clou dans le cercueil du pacifisme allemand, le nouveau ministre allemand de la Défense, Boris Pistorius, se fait photographier en tourelle d’un char “Léopard 2” prêt à être envoyé en Ukraine.

“C’est de la folie, et personne n’a l’air de s’en soucier”, commente l’éditorialiste américain Tucker Carlson sur Fox News.  Et Les Pays-Bas ont déjà annoncé qu’ils étaient prêts à fournir des F-16, que les Américains annoncent tester 2 pilotes ukrainiens sur des F-16 en simulateur et étudier l'installation de leurs missiles sur des Mig-29 ukrainiens, quand les Britanniques annoncent former des pilotes ukrainiens sur leurs avions Phantom.

Même la France réfléchirait à fournir ses Mirage. L’OTAN montre qu’elle est prête à vider ses arsenaux pour l’Ukraine et repousse sans cesse ses limites. Où cela s’arrêtera-t-il ?

Dans quel but ?

L’objectif officiel de l’Ukraine est de récupérer tous ses territoires, Crimée comprise, dans les frontières de 1991. Le changement de régime en Russie fait aussi clairement partie de l’agenda, puisque le président Zelensky a interdit par décret toute négociation avec le président Poutine.

Ces objectifs maximalistes étant totalement inacceptables pour au moins les trois quarts des Russes, ils ne pourraient être remplis que si la Russie était affaiblie au point de devenir un pays du tiers-monde, au point de ne plus pouvoir se défendre avec des armes conventionnelles, et d’être à la merci non seulement d’un changement de régime, mais d’un démantèlement - hypothèse sur laquelle des think tanks travaillent très sérieusement.  Des cartes circulent. Et de plus en plus d’internautes, de Tallinn à Kiev, en rêvent.  Le conseiller de Zelensky, Mikhail Podolyak, appelle même ouvertement à bombarder Moscou, Saint-Petersbourg et Ekaterinburg.

Le président Biden a récemment répété que l’objectif est d’affaiblir la Russie au point de l’empêcher de faire ce qu’elle a fait en Ukraine. Dans le fond, l’OTAN veut interdire à tout autre pays de faire ce qu’elle-même se permet de faire impunément depuis 30 ans, bombarder et envahir qui bon lui semble, mais toujours avec bonne conscience. C’est la domination sans partage du monde par les Etats-Unis et ses vassaux zélés qui est en jeu.

Le point de vue russe ignoré

Que cela plaise ou non, la Russie considère la Crimée et les quatre nouvelles régions ukrainiennes annexées en septembre 2022 comme partie intégrante de son territoire. Et les Russes ont déjà annoncé que toute attaque contre les « intérêts vitaux » de la Russie déclencherait une riposte nucléaire. Personne ne sait à partir de quel moment la Russie considèrera que ses intérêts vitaux sont menacés. Dès qu’un missile visera Moscou ? L’Ukraine et l’OTAN jouent donc avec le feu, et c’est un feu nucléaire.

Or, la Russie a l’arsenal nucléaire le plus sophistiqué au monde. Elle serait le seul pays à disposer de missiles hypersoniques opérationnels (avec la Chine), des missiles tellement rapides qu’il n’est pas possible de les intercepter avec les technologies actuelles. S’engager dans une lutte à mort avec la Russie est donc pure folie.

Les appels - faussement ou vraiment naïfs - de beaucoup au simple retrait des forces russes de tous les territoires contestés semblent ignorer, ou ne pas comprendre, les raisons fondamentales qui ont poussé la Russie à conduire cette opération militaire spéciale, devenue une véritable guerre.

Cette ignorance que les médias occidentaux ne font quasiment rien pour corriger constitue le grave danger qui nous menace collectivement.  Et traiter de "valets poutiniens" tous ceux qui alertent sur la nécessité de ne pas négliger le point de vue adverse relève de l’irresponsabilité et de l’inconséquence, voire de la simple propagande guerrière.

Pourquoi l’argument moral ne tient pas

Pour les donneurs de leçons professionnels occidentaux, qu’on connait bien en France, il n’y a d’autre choix que d’aider l’Ukraine "quoi qu’il en coûte", parce que ce serait moralement juste : parce que Poutine serait un tyran sanguinaire, un nouvel Hitler avide de conquêtes, qui massacre les civils par plaisir et qui s’attaquera au reste de l’Europe si on ne le repousse pas dans ses frontières de 1991.

D’abord, les crimes de guerre russes en Ukraine ont été très largement exagérés, surexploités, quand ils n’ont pas été créés ou inventés par les Ukrainiens eux-mêmes. Cela fait partie des techniques de diabolisation de l’ennemi, des opérations d’influence et de guerre psychologique.  Voir tous les articles déjà publiés sur France-Soir à ce sujet. Même Olekseï Arestovitch, le propagandiste professionnel de la présidence ukrainienne qui a été poussé à la démission le 17 janvier, a récemment reconnu que les Russes ont tout fait pour minimiser les victimes civiles au début de leur intervention, détruisant le narratif véhiculé jusque-là.

Ensuite, l’Ukraine d’aujourd’hui est loin d’être un parangon de démocratie, qui mériterait qu’un Européen se batte pour elle jusqu’à la mort. C’est un pays ultra-corrompu, qui vient encore de le démontrer avec un récent scandale qui a obligé à la démission plusieurs ministres adjoints et plusieurs gouverneurs de régions frontalières.

C’est aussi un pays qui n’a pas fait son aggiornamento avec son passé de collaboration avec le nazisme et ses propres crimes de masse contre les Polonais et les Juifs. Au contraire, les responsables idéologiques de cette période sont érigés en héros et en modèles. Dans toute l’Europe, Arno Klarsfeld semble être le seul intellectuel médiatique qui s’en émeut.

C’est encore un pays qui, avec l’aide américaine, a destitué un président élu grâce à un massacre sous fausse bannière organisé sur la place Maidan en février 2014, dans un scénario d’une rare perversité, comme l’a brillamment démontré l’universitaire d’origine ukrainienne Ivan Katchanovski.

Mais le travail monumental de ce dernier reste totalement ignoré par l’ensemble des médias occidentaux, ce qui est scandaleux. La guerre déplorable que nous voyons aujourd’hui n’est que la conséquence de la prise de pouvoir par la force des nationalistes ukrainiens et de leurs parrains américains.

L’Ukraine est enfin un pays où les chaines de télévision ukrainiennes jugées pro-russes ont été interdites dès 2021, un pays où 11 partis d’opposition ont été suspendus puis interdits au cours du 1er semestre 2022, et un pays où le gouvernement vient de se doter du pouvoir de fermer n’importe quel média sans décision de justice.

Cette tendance à l’éradication de tout contre-discours était déjà latente dans la société depuis le coup d’Etat de Maidan. L’intervention russe de février 2022 n’a fait qu’accélérer le phénomène et lui donner un vernis de légitimité. Pour les nationalistes ukrainiens, se sentir proche de la Russie n’est pas une opinion, c’est un crime qui doit être puni. Et cela l’a été dès le printemps 2014, notamment quand les bataillons de représailles comme Azov et autres semaient la terreur dans le Donbass, à la chasse aux séparatistes, commettant de nombreux crimes de guerre. L’Occident a décidé d’ignorer tout cela.

Ces nationalistes ukrainiens et leurs dirigeants semblent ne se fixer aucune limite. Ils paraissent croire à leurs propres mensonges. Leur haine de tout ce qui est russe parait être leur seule boussole et semble aujourd’hui les aveugler, les rendre gravement irréalistes. Ils se sont montrés incapables d’accepter les compromis et les concessions, aujourd’hui comme hier, comme l’a démontré leur refus d’appliquer les Accords de Minsk ou d’accorder le moindre statut à la langue russe. Et on devrait risquer la 3ème guerre mondiale pour ces gens-là ?

Par ailleurs, Merkel et Hollande ont tous deux avoué en décembre 2022 que ces Accords de Minsk, qu’ils ont signé, avaient pour but de donner du temps à l’Ukraine pour se réarmer, et pas de régler le problème du Donbass par la voie pacifique. Et cette trahison de leur propre parole, qui plus est de la parole d’État, ne semble choquer personne en Occident. Cela est encore plus extraordinaire. L’Europe donneuse de leçons a ainsi perdu tout magistère moral, mais elle continue à faire semblant d’incarner le Bien.

Quant à l’idée que les chars russes menaceraient le reste de l’Europe, aucun élément ne la soutient. Mais à force de s’immiscer militairement dans un problème bilatéral entre l’Ukraine et la Russie, on finira peut-être par véritablement provoquer la Russie à nous faire la guerre. Est-ce le but ?

Objectivement, l’incursion militaire russe en Ukraine était une violation du droit international. Mais les interventions de l’Occident en Serbie, en Irak ou en Syrie, non-autorisées par l’ONU, ne l’étaient pas moins, et la destruction de la Libye a honteusement exploité une résolution qui ne prévoyait qu’une zone de restriction aérienne. L’Occident justifiait ces dernières guerres au nom de la lutte contre les dictatures et de la défense des opprimés.

C’est à peu près comme cela que la Russie justifie son intervention, et cela n’est pas dénué de tout fondement. Je le sais pour avoir passé 5 ans dans le Donbass. La Russie y ajoute une dimension supplémentaire, qui est de lutter contre une grave menace à ses frontières mêmes, ce qui n’est pas non plus absurde, quand on voit ce qui se passe aujourd’hui.  L’Ukraine russophobe gonflée à bloc par l’OTAN ne rêvait que d’offensive militaire.

À cela s’ajoute les complications nées de la dissolution de l’URSS, qui a fait perdre à la Russie des terres historiques qu’elle avait colonisée il y a trois siècles, séparant du jour au lendemain des millions de Russes ethniques de leur nation d’origine.

Est-il juste d’ignorer délibérément cette dimension historique et anthropologique ? Est-il juste d’ignorer la volonté des populations locales en refusant toute idée de référendum, même supervisé par l’ONU ? En refusant de discuter de ces questions, l’Occident a démontré son mépris des peuples, y compris des peuples occidentaux qui ne sont consultés en rien quant à l’idée de continuer à armer l’Ukraine, au risque d’un cataclysme global.

Une "victoire" qui demeure improbable

Le président Macron explique que la France aidera l’Ukraine jusqu’à la victoire finale. Y croit-il ? Si c’est le cas, alors ce sera une guerre sans fin, jusqu’à l’anéantissement de l’une ou l’autre des parties, voire de toutes.

Pour beaucoup d’observateurs, comme Die Welt, l’aide occidentale ne fera que prolonger l’agonie de l’Ukraine. Elle permettra peut-être de contenir l’armée russe, voire d’obtenir un succès localement, mais certainement pas d’aider l’Ukraine à reconquérir toutes ses terres. Il faut un rapport de 3 contre 1 pour mener à bien une offensive. L’Ukraine en peine aujourd’hui sur le front sera encore loin de l’obtenir si elle doit compter sur ses propres soldats.

Olekseï Arestovitch, le conseiller déchu de Zelensky et expert militaire, explique qu’il ne faudrait pas que des chars, mais aussi 400 000 soldats bien équipés et entrainés pour reconquérir les territoires perdus. Or, il affirme que l’Ukraine ne les a pas, et ne les aura pas. Il conclue alors qu’un statuquo à la coréenne serait le mieux que l’Ukraine puisse espérer.

Contrairement à ce qu’on essaye de nous faire croire sur les plateaux de télévision français, l’armée ukrainienne s’épuise de jour à jour à tenter de conserver le contrôle de Bakhmout. L’essentiel de ses réserves est mobilisé dans un combat d’attrition où les Russes dominent grâce à leur artillerie.

La question des délais de livraison

En outre, la disparité des armements occidentaux fournis à l’Ukraine pose des problèmes de formation des personnels et de logistique importants, notamment pour la maintenance.

Le général Breedlove, ancien commandant suprême des forces de l’OTAN, a déclaré que les chars occidentaux risquaient d’arriver trop tard sur le champ de bataille.

L’Allemagne s’est plaint que la plupart des pays qui ont promis des chars ne les livrent pas assez vite. Et le Secrétaire général de l’OTAN, Jens Stoltenberg, a alerté l’alliance sur le risque de manquer de munitions.

Quant aux 31 chars américains Abrams, ils ne sont pas annoncés avant le mois d’août, voire à l’automne, ce qui inquièterait Zelensky.  Les Occidentaux craignent aussi de voir leur technologie tomber entre les mains des Russes, ce qui explique le nombre de tanks relativement limité qu’ils s’apprêtent à envoyer, mais aussi les délais de livraison.

À la différence d’une pièce d’artillerie, comme le Caesar, qui a une portée de plus de 40 kilomètres, un char d’assaut est une arme qui s’approche au plus près des lignes ennemies, et qui est donc plus susceptible d’être récupéré par l’adversaire en cas de problème.

Si les médias occidentaux ne mentionnent que les matériels russes récupérés par l’Ukraine, en fait, les deux belligérants ne cessent de récupérer des matériels adverses au grés des offensives respectives. Il suffit de voir les photos et vidéos de “trophées” qui pullulent sur Telegram pour s’en convaincre.

Le colonel Mc Gregor, un brillant expert militaire Américain qui fut conseiller du Secrétaire à la Défense sous Trump, et qui a toujours des contacts dans l’armée, a expliqué au sujet des Abrams américains que ces derniers disposent d’un blindage dont la composition est secrète.

Comme les Américains craignent que cette technologie de pointe ne tombe entre les mains des Russes, ils ne vont pas livrer de chars pris sur les stocks de l’armée américaine. Les chars qu’ils se sont engagés à livrer doivent donc être fabriqués complètement, ce qui explique ces délais de livraisons incompressibles de plusieurs mois.

Les “Léopards 2” sont livrés plus rapidement, mais avec une formation express des personnels. Le 8 mars, Boris Pistorius, le ministre allemand de la Défense annonçait la livraison courant mars à l’Ukraine de 21 chars Léopard 2 (18 allemands et 3 portugais). La Pologne en a déjà livré 4 et doit aussi en livrer 10 autres dans la semaine. L’ensemble (35 chars) a de quoi équiper un bataillon à trois escadrons. 80 “Leopard 1”, un char plus ancien, devraient être livrés en mai, venant du Danemark, des Pays-bas, et de l’Allemagne.

Avec quelle main d’œuvre ?

Quels sont les soldats ukrainiens qui vont utiliser ces nouveaux armements ?

Dans l’article “L’Ukraine entre culte du sacrifice, mobilisations forcées et suicides”, nous avons vu que l’Ukraine a de gros problèmes pour trouver de nouveaux soldats.

Pourquoi donc l’OTAN devrait-elle pousser le peuple ukrainien à se saigner jusqu’au dernier pour un combat dont les hommes en âge de se battre ne veulent plus ? A l’évidence, l’OTAN se fiche des Ukrainiens, qui ne sont que de la chair à canon, des pions sur le grand échiquier de la lutte entre les empires. Seuls les conformistes et les idiots utiles de la propagande otanienne, qui ont pignon sur rue dans les médias, croient aux mensonges va-t-en-guerre de Washington et Bruxelles sur la victoire au bout du fusil d’une Ukraine unie.

Ce manque de main d’œuvre compétente et motivée en Ukraine pose une autre question. Qui va piloter tous ces chars, ces blindés d’infanterie, ces systèmes de missile, ces avions que l’OTAN est prête à livrer ? On nous annonce qu’il faut des mois, voire des années pour apprendre à se servir de ces systèmes d’armes sophistiqués. Qui peut croire que la main d’œuvre qualifiée pourra être formée en quelques semaines ? Ainsi, à moins d’avoir des militaires professionnels de l’OTAN secrètement affectés à des postes-clefs, on ne voit pas comment l’armée ukrainienne pourrait utiliser efficacement tout ce qu’on s’apprête à lui envoyer.

Un officier autrichien explique qu’envoyer des soldats de l’OTAN se battre en Ukraine sous couverture du statut de mercenaire ou de volontaire étranger n’est pas compliqué. Déjà, les rumeurs courent sur le fait que des milliers de « mercenaires » polonais sont en fait des soldats d’active en congé spécial. A la fin novembre, au moins 1200 Polonais étaient déjà morts sur le front en Ukraine.

Dès la fin janvier, d’après ce post sur Télégram, des affiches sont apparues en Pologne pour recruter des tankistes qui iront se battre en Ukraine. Il est aussi avéré que des forces spéciales occidentales sont déjà sur le terrain. Le glissement vers la cobelligérance des pays de l’OTAN est quasiment acté. La livraison d’armes - dont le but est de tuer des Russes - ne va qu’accentuer le mouvement.

Et une fois qu’on ne pourra plus faire illusion, va-t-on envoyer officiellement les troupes régulières ? Ce serait dans la logique du "whatever it takes" dans laquelle les gouvernements occidentaux se sont follement engagés.

L’étape d’après, ce serait la mobilisation en Occident, puis la guerre nucléaire. "Whatever it takes !" Si les mots ont un sens, on en arriverait là. Et en France, il n’y a aucun débat sur tout cela.

Les seuls vainqueurs : le complexe militaro-industriel américain

Un article publié dans la revue stratégique Foreign Policy résume la situation : l’Ukraine n’a pas assez de troupes, et les chars arriveront trop tard.

Et les seuls qui se réjouissent de la situation sont les marchands d’armes, notamment les Américains. Une fois que l’Europe aura épuisé ses stocks et son économie, les Américains seront trop heureux de les reconstituer avec du matériel américain, si le monde ne s’est pas autodétruit dans un conflit nucléaire.

Dans ce contexte, on peut rappeler le discours d’adieu du président Eisenhower, en janvier 1961, sur le danger de l’influence du complexe militaro-industriel sur la politique américaine. Alors que les États-Unis sont quasiment en guerre perpétuelle, directement ou indirectement depuis la deuxième guerre mondiale (Corée, Vietnam, Amérique centrale, Irak, ex-Yougoslavie, Afghanistan, Moyen-Orient), comment ne pas voir la main de ce lobby surpuissant, jusqu’à aujourd’hui ?

Pour Julian Assange, le but des guerres menées par les États-Unis n’était pas de gagner, mais d’alimenter la guerre perpétuellement, pour que le fameux lobby ait une source de revenus inépuisable.

Le scénario de cette guerre en Ukraine, où la fourniture d’armements procède par étapes, semble correspondre à cette analyse. On donne juste assez pour que l’Ukraine puisse tenir tête, pour continuer le combat, pour saigner un peu plus la Russie, mais pas pour gagner.  Le seul espoir qu’entretiennent les va-t-en guerre occidentaux est de faire souffrir suffisamment la Russie dans cette guerre par procuration qui utilise sans vergogne la chair à canon ukrainienne, espérant un changement de régime à Moscou. Or, l’économie russe a résisté aux sanctions et Poutine a rarement été aussi populaire.

La fin de l’hiver et le printemps ont des chances d’être décisifs dans cette guerre. L’armée russe a encore des centaines de milliers de soldats en réserve, d’après Douglas McGregor. Vont-ils attaquer avant que l’Ukraine ne reçoive tous ces nouveaux armements ? Où vont-ils attendre l’offensive ukrainienne pour mieux la contrer ?

Quoi qu’il en soit, de plus en plus de Russes ont compris que cette guerre a dépassé l’Ukraine, et qu’elle oppose la Russie à l’OTAN dans ce qui ressemble de plus en plus à une lutte à mort. Dans cette escalade qui lui impose l’OTAN, les Russes - qui ont le plus à perdre - ne vont certainement pas céder.

Cette politique d’armement sans fin de l’Ukraine, sans laisser la moindre place à la négociation, n’est donc que vaine folie. En prétendant aider l’Ukraine, l’Occident ne fait que la saigner à blanc et la pousser vers la destruction. Même les partisans sincères de l’Ukraine qui ne seraient pas aveuglés par la haine et le désir de vengeance devraient pouvoir le comprendre.

Comme le disait Henry Kissinger : "Être un ennemi de l’Amérique peut être dangereux, mais être son ami est fatal". L’Ukraine est en train d’en faire l’expérience.

Mais l’Europe risque aussi sa propre destruction dans cette guerre.