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21 juillet 2023

Radu Portocala

La mort qui est porteuse de silence peut aussi interrompre le silence – celui que je m’étais imposé pour quelques semaines – quand il s’agit de parler d’elle et de celui qu’elle a enlevé.
Je n’ai jamais rencontré Alexandre Adler – dont certains, ces jours-ci, déplorent la disparition ; j’ai parlé une seule fois avec lui, au téléphone. Pourtant, il a joué un rôle profondément négatif dans mon existence.
En octobre 1990, je publiais chez Calmann-Lévy « Autopsie du coup d’État roumain », un livre (suivi de deux autres, en 2009 et 2019) dans lequel je démontrais que ce n’était pas une révolution qui avait renversé Ceausescu, mais un coup d’État dirigé par les services soviétiques. Dans le dernier chapitre, je donnais la liste des membres du gouvernement issu de cette opération. Bien entendu, je citais avant tous les autres le premier ministre Petre Roman, fils de Walter Roman, apparatchik communiste de la première heure, arrivé à Bucarest en août 1944 sur les chars soviétiques et dûment oint par Moscou. Toutes choses archi-connues en Roumanie.
Quelques mois plus tard, Adler m’appela pour me dire qu’il était très fâché contre moi. Comme nous ne nous étions jamais rencontrés, je fus étonné. Il m’expliqua que son énervement venait du fait que j’avais écrit « des choses horribles sur Walter Roman ». Après quelques minutes d’une discussion que je qualifierais de parfaitement stupide – et durant laquelle il essaya de me convaincre que Walter Roman avait été un brave opposant au régime communiste –, je lui demandai d’où il tenait toutes ces absurdités. Il me répondit : « Mais vous ne savez pas ? Walter était mon oncle. Petre est mon cousin. » Et il m’expliqua que, pendant plus d’un an, il s’était occupé de Walter Roman, qui, malade, avait été envoyé à Paris par le Comité central roumain pour se faire soigner. J’essayai de lui montrer que jamais un opposant au régime ne pouvait jouir d’un tel privilège, mais ce fut peine perdue. Il mit fin à l’appel en me disant : « Ça ne restera pas là ! » Autrement dit, en me menaçant.
À l’époque, j’écrivais dans « Le Point » et il arrivait que je sois invité dans des émissions de radio ou de télévision. J’avais un certain nombre d’amis dans la presse. Adler, agissant certainement pour le compte de son lamentable cousin Petre Roman, qui a cherché pendant des années à présenter son père comme un héros, n’a pas tardé à faire une première tentative auprès du « Point ». Il a cherché à persuader la direction du journal que j’avais, jusqu’en 1989, fait de l’espionnage pour les services de Bucarest. On lui rit au nez.
Il eut plus de succès avec la deuxième tentative. En bon délateur doublé d’un mythomane, il informa la direction du « Point » que je fréquentais assidûment les milieux fascistes. Avec une telle accusation, il ne pouvait rater son coup. Le journal m’informa, donc, que ma collaboration n’était plus nécessaire ou souhaitable. En même temps, toutes les rédactions avec lesquelles je pouvais espérer collaborer me fermaient leurs portes. Plus personne ne répondait à mes appels, les articles que j’envoyais n’étaient même pas lus. Mes « amis » journalistes me tournèrent tous le dos – même ceux qui, peu de temps auparavant, s’invitaient à dîner et me commandaient tel ou tel plat roumain. (Si j’étais un tant soit peu mesquin, je pourrais donner ici quelques noms, car certains d’entre eux sont devenus assez connus.)
En somme, Adler, avec l’aide de rédactions stupides, m’a soumis à une censure complète, définitive – comme appliquant une technique apprise dans un manuel du Komintern. Ce qui, d’ailleurs, est assez logique, car il a été membre du Parti communiste – auquel il a adhéré précisément au moment ou nombre d’intellectuels – et pas seulement – le quittaient, c’est-à-dire après l’invasion soviétique de la Tchécoslovaquie, en 1968. Un choix plutôt lamentable.
En 1994, j’obtins un petit poste au « Courrier international ». Je devais dénicher et traduire, de temps à autre, des articles de la presse roumaine. C’était un petit travail, très peu payé. Mais cet argent m’était utile. Un an après le commencement de cette activité, je reçus une lettre m’annonçant en termes pompeux qu’une vaste restructuration de la rédaction « nous oblige de nous séparer de bon nombre de nos collaborateurs ». J’appelai mon chef de service, qui était devenu un ami, et lui demandai combien de malheureux avaient été sacrifiés sur l’autel de cette restructuration. Il me répondit simplement : « Un seul. Toi. » Pourquoi ? Mais parce que Adler venait d’être nommé au poste de directeur de la rédaction !
Je compris alors qu’il ne voulait pas seulement m’empêcher de publier, mais aussi m’empêcher de gagner mon pain, me pousser peut-être à devenir balayeur ou laveur de voitures. Tout cela afin de défendre un personnage dont un pays entier sait qu’il a été un misérable. Pour célébrer les 20 ans de la chute de Ceausescu, « Le Figaro » n’a rien trouvé de mieux que de publier un éloge de Walter Roman, tissu de mensonges, rédigé par Adler. Rien d’autre !
Je ne me suis pas réjoui quand « Le Point » (car il y a parfois une symétrie dans la vie) l’a envoyé promener parce qu’il cherchait à publier des choses qui n’étaient pas vraies ; ni quand LCI a cessé de l’inviter parce qu’il avait cité dans ses commentaires des noms qui n’existaient pas ; ni quand la rédaction du « Courrier international » a compris que le grand savoir dont il faisait étalage lorsqu’il était invité à la télévision était dû à de très longues consultations préalables de l’Encyclopædia Britannica ; ni quand, petit à petit, nombre de gens sérieux ont compris que ce qu’il présentait comme des analyses savantes n’avait aucun intérêt. Je ne me réjouis non plus de sa mort. Je dois être dépourvu de cette capacité, puisque même la mort de Ceausescu ne m’a produit aucune réjouissance. Je n’espère même pas qu’il payera le mal qu’il m’a fait, ni les 27 ans de silence qu’il m’a infligés. J’espère tout simplement ne pas avoir le désagrément de lire ici ou là qu’il était un homme bien, car il ne l’était définitivement pas.

19 juillet 2023

Yann Bizien

Avec cette image d'autosatisfaction, de BFM TV, agence de communication de l'exécutif, je publie l'éditorial du Figaro de ce jour. Il dit tout le contraire, en quelques mots seulement, sur Emmanuel Macron et le Gouvernement.

La France s'en moque. Le fait majeur de ce dernier épisode politique, ce n'est pas le maintien d'Élisabeth Borne à Matignon ou l'hégémonie contenue de Gérald Darmanin à l'intérieur du gouvernement, c'est l'indifférence totale de l'opinion pour ce jeu de pouvoir. La hausse de 10 % des tarifs de l'électricité le 1er août l'emporte déja dans les conversations. Signe supplémentaire de la dévitalisation de la décision politique. Illustration spectaculaire de la faiblesse, même symbolique, de ce second quinquennat. Le maître des horloges perd son temps : du haut de son nuage, Jupiter procrastine, tergiverse, hésite à faire tomber la foudre, et finalement décide de ne rien décider.
Quant à la parole publique, épuisée de considérations sur à peu près tous les sujets, elle rechigne à s'emparer d'un événement essentiel, des émeutes violentissimes, qui pose à notre nation une question existentielle. Emmanuel Macron finira, paraît-il, par l'évoquer dans la semaine, mais, pour justifier cette latence, il lui faudra accompagner son propos de décisions fortes.
Non, l'ordre n'est pas revenu quand, malgré la mobilisation du Raid, du GIGN et de dizaines de milliers de policiers et de gendarmes, des voitures brûlent par centaines le week-end du 14 Juillet. Non, cet embrasement spectaculaire, et peut-être prémonitoire, n'est pas éteint. Chaque semaine, forces de l'ordre, pompiers, médecins, simples citoyens subissent physiquement les coups de la violence gratuite. Les émeutes furent la forme extrême d'un phénomène de basse intensité qui traverse le pays tous les jours de l'année et qui étend sa menace sur les moindres détails de la vie quotidienne. Elles sont la conséquence d'une immigration hors de contrôle, d'une intégration en lambeaux, d'une autorité introuvable, d'une école en ruine. Las ! Pour le gouvernement, l'immigration n'a rien à voir avec tout cela. Quant au ministre de l'Éducation, il semble plus occupé, dans un élan mélenchonien, à trier le bon grain de l'ivraie d' « extrême droite » dans les rédactions des radios et des télévisions qu'à restaurer les savoirs fondamentaux ou à panser les plaies des dizaines d'écoles détruites...
Face à l'ampleur de ce défi, ce minuscule jeu de chaises musicales au sommet du pouvoir a quelque chose de dérisoire, sinon d'indécent.
Le maître des horloges perd son temps.
LE FIGARO

18 juillet 2023

Dominique Lelys

Lorsque Milan Kundera nous parlait, dans la Revue des Deux Mondes, de la disparition de notre civilisation…

« Une chose me paraît évidente : l'Europe nous a quittés. Son départ vers le néant s'est passé devant nos yeux. Et nous faisons semblant de n'avoir rien vu. Peut-être n'avons-nous vraiment rien vu. Cet incroyable événement n’a donc été ni médité, ni analysé, ni même décrit, ni même constaté, parce que le monde tel qu'il s'est formé dans les dernières décennies est devenu indifférent à l'œuvre de Goethe, à celle de Fichte, d’Heidegger, de Fellini, donc à leur présence et à leur absence. Si un vieil oncle que personne n'a fréquenté meurt, on pourra facilement ne pas s'apercevoir de sa disparition. Qui d'ailleurs est vraiment bouleversé, atteint, abîmé par l'effacement de la culture européenne ? Il y a malgré tout deux victimes qui doivent en souffrir : d'abord, bien sûr, la philosophie et l'art eux-mêmes. Et puis, la France. Car l'autorité exceptionnelle de la France dans les deux, trois derniers siècles était due à la place privilégiée que les œuvres culturelles occupaient dans la vie de l'Europe. Je parle à partir de mon expérience personnelle : l'ambiance spirituelle de toute ma jeunesse tchèque fut marquée par une francophilie passionnée. C'était juste après la guerre; ce qui signifie que l'amour de la France a plus ou moins facilement survécu au choc de Munich (pourtant vécu douloureusement comme une trahison). Comment a-t-il pu y survivre? Parce que l'amour de la France ne résidait jamais dans une admiration des hommes d'État français, jamais dans une identification à la politique française ; il résidait exclusivement dans la passion pour la culture de la France : pour sa pensée, pour sa littérature, pour son art (l'art moderne en particulier). Quand la culture pour un Européen ne représente plus grand-chose, c'est par une logique fatale que le monde devient indifférent à la France.
Et puisqu'on rejette le passé toujours avec une certaine passion, cette indifférence prend souvent le caractère d'une aversion, et l'indifférence à la France devient francophobie (une raison de plus pour moi d'aimer la France, sans euphorie, d'un amour angoissé, têtu, nostalgique). »

Extension indéfinie du champ de « l’extrême droite »

Maxime Tandonnet

M. Mélenchon traite le CRIF d’extrême droite, M. Pap N’Diaye traite Cnews et Europe 1 d’extrême droite, Libé traite Franck Ferrand d’extrême droite. Ne parlons même pas du propos scandaleux sur le CRIF. Le cas de Franck Ferrand est intéressant. Il subit un peu la même tentative de diabolisation que Lorent Deutsch. Raconter l’histoire, le déroulement des événements autour de la Nation et des ses héros ou traitres, captiver le grand public grâce au récit national serait désormais d’extrême droite… Cela fait penser à la remarque d’EM qui voulait « déconstruire notre histoire ». Bref, la Nation et les racines deviendraient d’extrême droite. En fait cette expression est devenue l’insulte suprême des bienpensants. Tout ce qui n’est pas dans leur ligne, dans le sens des modes idéologiques, déconstruction, woquisme, multiculturalisme, climatisme, serait désormais, par définition, d’extrême droite. Or, cette formule, réduite à n’être qu’une insulte, un épouvantail, ne veut plus dire grand chose. Historiquement, l’extrême droite se définissait par le culte du chef (le Führer, le Caudillo ou le Duce), le refus du suffrage universel comme principe de légitimité, donc la préférence en faveur d’une « autorité verticale » contre la démocratie ou le pouvoir du peuple, le parti et la pensée uniques, l’emprisonnement ou l’assassinat des opposants, l’interdiction des libertés publiques (presse, expression, réunion, syndicale). D’ailleurs, à bien des égard, l’extrême droite partage des points communs avec l’extrême gauche, en tout cas la tentation totalitaire. Ce naufrage dans une logique d’opprobre et de diabolisation du monde politico-médiatique est bien le signe de sa crétinisation: dès lors qu’il n’a plus rien à dire, à court d’arguments et d’idées, il lui reste l’injure pour s’exprimer.

13 juillet 2023

Breton : l’obsession de la censure

Gilles La Carbona
Secrétaire national du RPF au suivi de la vie parlementaire

À partir du 25 août, Thierry Breton le commissaire européen a annoncé que les réseaux sociaux auront l’obligation d’effacer immédiatement les « contenus haineux », ou qui appellent à la révolte.

La définition de ces deux contraintes demeure floue et ambiguë, surtout quand on sait qui aura en charge d’en fixer le cadre et les limites. Rien n’est dit sur ce que revêt le terme de haine. Est-on haineux quand on remet en cause l’efficacité des vaccins ? Ou quand on doute du bien apporté par une immigration, dont on mesure tous les jours les méfaits ? Ou même, quand on conteste une réforme de nos retraites, commandée par la commission européenne. Est-on haineux quand on se demande pourquoi nous dilapidons argent et matériel militaire pour une guerre qui ne nous concerne pas, mais dans laquelle nous pourrions être entraînés à force de provoquer frivolement la Russie ?

On se plaît à cumuler les effets, supprimer des contenus pour qu’ils n’influencent pas, mais s’ils sont réellement haineux, ou qu’ils appellent au soulèvement ne tombent-ils pas déjà sous le coup de la loi ? Pourquoi ne pas l’appliquer ici, au lieu de jouer les père Fouettard ? On cherche des solutions inédites alors qu’il suffit d’utiliser les mesures qui existent déjà. La volonté derrière cette censure est tout autre, et le prétexte est simplement là pour permettre tous les abus de pouvoir. Qui sera chargé de considérer et de sanctionner les éventuelles dérives qu’une telle possibilité donnée à un pouvoir engendrera inévitablement ? « Tout homme qui a du pouvoir est porté à en abuser ». Fera-t-on mentir Montesquieu ? Sans doute pas, d’autant que Breton n’a jamais caché son penchant pour le contrôle de la parole et s’il le pouvait, de la pensée. L’acharnement à purifier les réseaux sonne comme celui d’expurger de la communauté chrétienne les parjures au XVème siècle, ceux qui doutent ou simplement qui n’épousent pas les idées établies que la science remet en cause. Il faut empêcher qu’une pensée qualifiée de subversive ne vienne troubler la volonté des délires de Davos. Un contenu haineux commence et cesse où ? Tout état autoritaire a besoin de contrôler l’ensemble des médias pour s’assurer docilité et endoctrinement. Cette nouvelle croisade est menée par des fanatiques tyranniques, imbus d’eux-mêmes et pour le moment intouchables. Qui sanctionnera les éventuels abus, les extensions ou interprétations douteuses de ces fameux propos haineux ? Quant à l’appel à la révolte, où en est la frontière ? Est-ce que souligner son désaccord sur une décision de la Commission et appeler à manifester n’est pas le début de « la révolte », puisque c’est une remise en cause du pouvoir ?

On ne peut plus rien garantir de la libre expression en Europe avec des individus aussi peu fiables, ne supportant pas la contradiction, et considérant toute controverse contre leur éminent savoir, ou leur incomparable justesse de jugement, comme des crimes à leur encontre. Ne sont-ils pas les champions du monde du : « ce n’est pas de notre faute », et de désigner avec aisance les coupables, ou de s’affranchir de toute responsabilité.

Mais comment se fait-il que l’on doive user de censure pour maintenir la paix sociale, comme le suggère Breton ? La société serait-elle devenue plus haineuse, plus violente, et si oui quelles en seraient les causes ? Étrangement il n’y a pas d’analyse sur le germe, car, comme pour la macronie, cela reviendrait à faire le bilan des actions passées, et on y découvrirait la responsabilité évidente des politiques menées par les censeurs d’aujourd’hui. Plus de 30 ans de copinages politiques, de bassesses et d’entourloupes, ont exaspéré une grande partie des citoyens, contraints de choisir la violence en lieu et place d’une démocratie méconnaissable, surtout oublieuse de son principe vital, le respect du désir du peuple. Les gens ne sont pas devenus soudainement méchants, mais les politiques successives, sur l’immigration, sur le pouvoir d’achat, sur les retraites, le chômage, les libertés, rendent les peuples et les rendront encore plus vindicatifs. Lorsqu’il n’y a plus de place pour la justice et le dialogue, le soulèvement reste la seule expression possible. « La désobéissance civile devient un devoir sacré lorsque l’État devient anarchique ou corrompu. » Gandhi et d’autres avant lui ont posé les bases mêmes de l’incarnation de la liberté. Il n’est guère possible de contenir l’expression de l’exaspération par le poids de la censure. Le peuple réclame que l’on s’attaque aux causes, ce que le pouvoir refuse obstinément de faire, puisque par définition, il n’a jamais tort. À moins que ce pouvoir ne devienne fou étant donné que l’horloge est déjà en mode « compte à rebours » ?

12 juillet 2023

M. Pap Ndiaye, de Charybde en Scylla

Maxime Tandonnet

En mai 2022, je n’avais absolument aucun doute sur le fait que la nomination de M. Pap Ndiaye comme ministre de l’EN allait tourner au désastre.

Non pas seulement, à titre principal, pour son idéologie, mais tout simplement parce que je trouvais absurde de nommer sur ce poste un universitaire sans la moindre expérience de l’administration et du pilotage d’une équipe. Nous étions dans le pur coup de com’, classique, destiné à provoquer, à exprimer une forme de transgression, volonté de faire polémique, d’invulnérabilité – je fais ce que je veux, rien ne m’arrête. Au fond, je vous e…..

Évidemment, mes pires pressentiments se sont confirmés. L’Éducation nationale a poursuivi son effondrement. Mais le résultat est encore pire qu’attendu. Après les coups de menton de M. Pap Ndiaye contre l’école privée qui ont fait long feu, ce dernier s’en prend à Europe 1 et à Cnews qu’il accuse « d’extrême droite ».

Dans l’histoire de la démocratie française, je ne suis pas sûr qu’il existe de précédent du titulaire d’un grand ministère qui s’en prend ainsi à des organes d’information nationaux. Drapé dans l’idéologie du bien, le ministre voue désormais Europe 1 et Cnews aux gémonies. Car extrême droite, dans le discours politico-médiatique, veut dire « mal absolu », maudit, à combattre par tout moyen, à détruire.

C’est-à-dire qu’un membre du gouvernement diabolise deux chaînes d’information offrant comme un avant-goût de censure d’État. Au fond, toute forme d’expression qui n’est pas délibérément macroniste serait suspecte. Notez-bien : ce Monsieur ne s’est pas excusé, bien au contraire, droit dans ses bottes, et il est toujours en poste, donc pas démenti par le pouvoir. Terrifiant : l’ombre de la tyrannie sous le masque du bien progressiste.

IMPORTANT : je précise que le grand responsable de l’accélération de l’effondrement de l’Education nationale depuis 2017, n’est pas l’actuel ministre mais son prédécesseur M. Blanquer et son invraisemblable réforme du bac et du lycée, M. Blanquer qui était à l’époque l’idole des macronistes dits de droite.
Radu Portocala

L’Occident ne semble plus avoir d’autre ambition en politique internationale, plus d’autre projet, que d’anéantir la Russie. Vieux rêve des néo-conservateurs américains, agissant exactement comme les pigeons qui, une fois posés sur une cheminée, ne supportent pas la présence d’un autre congénère et l’attaquent pour l’en déloger. De la même manière, mais à une échelle infiniment plus grande, les États-Unis veulent le monde pour eux seuls et l’idée de partage avec qui que ce soit leur répugne. Malade de suivisme, la vieille Europe a fait sien ce fantasme et s’acharne contre elle-même, persuadée d’avoir ainsi trouvé le meilleur moyen d’abattre l’ennemi imaginaire de l’Est.
Mais peut-on vaincre un adversaire qu’on ne connaît pas, qu’on n’arrive pas à comprendre ? Depuis le commencement de cette guerre, tant d’inepties ont été dites sur la Russie par ceux qui, théoriquement, devaient tout savoir sur elle, que l’Occident batailleur a fini par donner de lui, de ses services d’espionnage, de ses analystes une image proprement ridicule. Une image qui contredit son discours intransigeant, le rend futile.
Ne veut-on ou ne peut-on connaître la Russie ? Avons-nous l’impression de lui être tellement supérieurs que cet effort ne nous semble pas valoir la peine d’être fait ? Ou tient-on absolument à devenir l’objet de ses moqueries ?
Il y a, cependant, un soupçon d’inquiétude dans tous les fantasmes que nous créons. Ne disons-nous pas – comme des enfants perdus la nuit dans la forêt – qu’elle est si faible tout simplement parce que nous la voyons forte ? Ne cherchons-nous pas à nous rassurer en annonçant tout le temps son écroulement ? Nous prenons nos vœux pieux pour des armes redoutables et nous les brandissons en faisant les gros yeux. Et nous déchirons vaillamment l’air tiède en restant figés dans l’ignorance dont nous faisons nos certitudes.

11 juillet 2023

Jean-Pierre Luminet

Je viens de recevoir une curieuse invitation de l’Ambassade de l’Inde à Paris : le premier Ministre de ce grand pays, M. Narenda Modi, souhaite me rencontrer personnellement « as the leader and pioneer in your field » au Plaza Athénée de Paris, lors de son passage à l’occasion du défilé du 14 juillet dont il est l’invité d’honneur.
J’ai évidemment décliné (poliment) l’invitation, me voyant d’une part mal faire un aller-retour Avignon-Paris pour bavarder quelques minutes avec ce certes très important personnage politique, d’autre part me retrouver en plein 14 juillet dans notre capitale cernée par des milliers de CRS et de policiers, casqués et armés comme dans les pires périodes de dictature fasciste.
Cela me conduit cependant à quelques réflexions. Primo, cela est toujours flatteur d’être reconnu à l’étranger pour mes travaux purement scientifiques, alors que dans mon propre pays (nul n’y est prophète, on le sait) je dois dire (sans amertume) que cela n’a guère été le cas, y compris de la part mes propres tutelles (CNRS, Observatoire de Paris, etc.) qui n’ont jamais apprécié ma farouche indépendance d’esprit mais qui, à l’occasion de ma nomination à plusieurs prix internationaux, ont parfois dû se fendre de communiqués de presse élogieux, essentiellement d’ailleurs pour en récolter à leur profit une part de petite « gloriole ».
Secundo, je m’interroge sur les dessous politiques de l’invitation que notre président Macron (pour lequel, vous le savez sans doute, j’éprouve une véritable aversion et le plus profond mépris), a adressée à M. Modi. Je rappelle que l’Inde, devenu le pays le plus peuplé au monde, fait partie avec la Chine, le Brésil, la Russie et l’Afrique du Sud, des BRICS, solide contre-poids à l’hégémonie mondialiste que les États-Unis et leurs valets occidentaux veulent imposer à la planète entière. Les BRICS (auxquels veulent désormais se joindre de nombreuses autres nations qui n’en peuvent plus de la dictature géopolitique américaine), sont partisans d’un monde multipolaire, de la dédollarisation des échanges financiers et économiques, et bien d’autres choses qui font trembler le colosse américain – désormais aux pieds d’argile – qui, sous l’invraisemblable et fallacieux prétexte de la démocratie, maintient depuis des décennies la planète sous ses bottes militaires, arrogantes et belliqueuses.
Or que voudrait Macron dans le dérisoire espoir de redonner du lustre à sa calamiteuse gestion des affaires internes du pays et ses consternantes prestations internationales qui font la risée de tous les pays non-alignés ? Être le premier dirigeant occidental à participer au prochain sommet des BRICS, qui doit se tenir au mois d’août en Afrique du Sud ! D’où sa manœuvre pour dérouler le tapis rouge pour M. Modi.
Je doute qu’il parvienne à le séduire, M. Modi étant tout le contraire de minus de type Trudeau ou Zelensky, sans parler du sénile Biden, la marionnette de l’état profond.

La fin des haricots ?

Eric Vial

11/7/2023 – J’apprends que la France aurait accepté que les USA envoient des obus à sous-munitions au profit de l’Ukraine et de l’OTAN dans le conflit qui l’oppose à la Russie.
Ces armes sont particulièrement destructrices pour les populations civiles.
Une arme à sous-munitions est un projectile ou une bombe transportant de nombreux autres projectiles explosifs, de tailles plus réduites qui permet de « traiter une large zone » mais « qui ne fait aucune distinction entre civils et militaires. Tout le périmètre est rasé ».
Handicap International dénonce son utilisation puisqu’elles provoquent des dommages irréparables notamment sur les populations les plus fragiles, celles qui ne peuvent pas fuir les zones de combats.
La majorité des pays dans le monde, dont la France, a signé une convention internationale qui ne permet pas son utilisation y compris en tant de guerre.
En 2022, les USA avaient averti la Russie que si elle utilisait ce genre d’arme elle serait accusée de « crimes contre l’humanité ».
Ce revirement de déontologie pour les Occidentaux a sans doute de multiples explications, mais en terme d’exemplarité de nos pratiques militaires, cela ne nous honore très clairement pas auprès des autres pays du monde.
Nous ne pouvons pas (je crois) codifier des pratiques guerrières, signer des conventions internationales, sanctionner économiquement les contrevenants pour ne pas respecter nous-mêmes les règles que nous avons fixées aux autres.
Il s’agit de la perte de notre crédibilité et de notre image dans le monde.
Notre empire s’effondre chaque jour un peu plus sous nos yeux.