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12 janvier 2024

Le diplomate

Gérard Araud

"On peut lire Ultima Ratio Regum, l’ultime argument des rois sur les canons de Louis XIV qui l’a d’ailleurs souvent oublié, mais cette devise devrait figurer dans tout manuel de relations internationales. Toute politique étrangère doit avoir pour objectif d’éviter le recours aux armes. Il faut, à la fois, toujours conserver, parfois ostensiblement, l’option militaire sur la table et tout faire pour ne pas avoir à y recourir. Ce n’est pas être munichois. C’est, au contraire, être prêt au pire - la guerre, quel que soit le nom qu’on lui donne - tout en sachant que c’est une solution toujours détestable par son coût humain, physique et moral, par les plaies qu’elle laisse et par ses incertitudes. Il n’y a de guerre indispensable que défensive. Une bonne politique réaliste est une politique pacifique. Les échecs américains en Irak et en Afghanistan et l’embourbement de la France au Sahel nous le rappellent.
Dans ce contexte, les diplomates sont plus que jamais nécessaires non seulement pour conclure des conventions internationales pleines de bons intentions et peu appliquées … mais aussi pour négocier. Oui, tout simplement négocier avec des interlocuteurs qui ne partagent ni nos intérêts ni nos valeurs, non pas pour servir une fin morale transcendante ou suivre des principes abstraits, mais pour atteindre des compromis partiels, temporaires et insatisfaisants.
Ce n’est pas par amoralisme mais simplement parce que, en premier lieu, imposer des valeurs à des pays qui n’en veulent pas est la plupart du temps impossible parce que l’histoire, la géographie et la culture définissent des limites étroites à ce qu’une société peut admettre. l’Irak et l’Afghanistan en ont offert une démonstration tragique par le coût humain du rêve américain d’y introduire une démocratie à l’occidentale, sans transition et sans préparation. Ensuite parce que les rapports de force limitent l’influence qu’on peut avoir sur l’évolution interne d’une grande puissance. Enfin parce que tout gouvernement doit tenir compte de la grande étendue des intérêts de son pays qui sont tous légitimes y compris les intérêts économiques.
...
Recourons donc au diplomate non pour sauver le monde mais pour empêcher qu’il sombre dans la violence qui est l’état de nature de la condition humaine selon Hobbes. Comprenons également que même pour atteindre ce modeste objectif il aura à œuvrer avec les forces que sont la peur, l’intérêt et l’honneur et non contre elles, ce qui serait sceller son échec.
Admettons enfin que l’objectif de la diplomatie est de se contenter du moindre mal plutôt que viser au bien absolu. A voir ce qui est arrivé en Irak depuis l’invasion américaine de 2003 et en Syrie depuis le début de la guerre civile en 2011, ne peut-on, par exemple, conclure qu’il y a pire qu’une dictature ? Nous, les Occidentaux détournons instinctivement le regard d'une telle affirmation et pourtant...
Oui, la politique étrangère, c’est parfois accepter le détestable pour éviter l’insupportable. Cette feuille de route tranche trop avec les enthousiasmes et les croyances de notre temps pour être aisément adoptée. Les images vite disponibles des agissements des dictateurs et les passions qu’elles suscitent sur les réseaux sociaux conduisent à l’exigence d’une réaction immédiate face à laquelle toute réticence est lâcheté et complaisance. L’émotion tient lieu de raisonnement.
Grâce à cette retenue, à cette empathie, à cette analyse froide des rapports de force et à cette connaissance de l’Histoire et du fardeau qu’elle représente sur la nuque des États, le diplomate trouve la force de lutter contre les passions ou les préjugés pour essayer d’introduire un minimum de rationalité dans la gestion des relations internationales. Il ne s’agit plus alors de lutte entre le bien et le mal, mais de la confrontation d’intérêts nationaux dont il faut essayer d’assurer la compatibilité.
C’est une entreprise ingrate. Il est facile à la folie des hommes de l’emporter au nom d’une illusion que seules les armes peuvent dissiper…
Les bons sentiments et les émotions sont plus convaincants que le rappel des intérêts et l’analyse des rapports de force. Le diplomate navré ne peut alors que se retirer dans l’attente du moment où, inévitablement, on fera appel à lui pour réparer les fautes dont il n’est pas coupable. Pourtant, tel Sisyphe, le diplomate de tous les temps et de tous les pays est condamné à essayer inlassablement d’éviter le pire, ce pire que les hommes portent en eux et chérissent particulièrement quand ils peuvent le travestir en morale et en droit. N’oublions jamais qu’en dehors de rares circonstances, la vraie morale, c’est la paix".
Gérard Araud, "Histoires diplomatiques", Grasset 2023

D’aucun camp

Denis Collin

On nous somme de choisir notre camp, être avec ou contre Israël. Je n’aime pas les camps, je ne choisis pas un camp. La situation est embrouillée depuis le commencement et personne, hormis les acteurs directs ne peut quoi que ce soit d’intelligent quant à la manière d’en sortir.
Sans doute la création d’un État « juif » sur la « terre promise » n’était-elle pas une bonne idée. Mais après les vagues antisémites et la destruction méthodique, industrielle des Juifs d’Europe, quoi d’autre ? Israël a été reconnu par la « communauté internationale » (URSS en tête !).
Ce qu’en suit, c’est ce qui arrive dans toutes les guerres qui s’éternisent. On peut dire « retour aux frontières de 1967 », mais les voisins d’Israël refusaient non pas ces frontières, mais l’existence même d’Israël. Les accords d’Oslo furent un échec, parce que les extrémistes israéliens n’en voulaient pas (ils ont assassiné Rabin) et parce qu’ils ne satisfaisaient pas une bonne partie des Palestiniens. Plus d’accord d’Oslo, plus d’État palestinien en vue et la colonisation, sans oublier le jeu pourri des gouvernements israéliens avec le Hamas, encouragé contre l’OLP « laïque ». Et encore la colonisation et les ravages de l’islamisme, et le 7 octobre, et la suite. La solution raisonnable – évacuer les colonies, internationaliser Jérusalem et reconnaître un État palestinien en accord avec la Jordanie, a bien peu de chances d’être entendue. Les fous mènent la barque. Netanyahou porte là-dedans une immense responsabilité, lui et son gouvernement et beaucoup d’Israéliens le savent, mais on ne règle pas ses comptes sous les roquettes. Les morts s’entassent.
Que faire ? Personne n’en sait rien. Suivre la voie et la voix de la raison, mais qui le veut ? Le pire est certainement que le conflit politique est submergé par les conflits religieux – du côté palestinien, bien sûr, mais aussi du côté israélien.

10 janvier 2024

Catherine Gaillard

Février 1954.
Mes amis, au secours... Une femme vient de mourir, gelée, cette nuit à trois heures, sur le boulevard Sébastopol, serrant sur elle le papier par lequel, avant hier, on l'avait expulsée...
L'Abbé Pierre

Janvier 2024 (70 ans plus tard).
Une femme “sdf“ est morte de froid sous une couverture, cette nuit, à Carpentras.
De souche ou clandestin(e), le scandale est le même.

Mourir en 2024 comme un chien abandonné dans la rue en plein hiver dans le pays qui nous a vu(e) naître et grandir est un fait totalement désespérant, révoltant, insupportable.
Permettre par un effondrement des politiques régaliennes et d'abandon de notre souveraineté, que certaines de ces personnes (clandestins) viennent s'échouer et mourir ici est aussi scandaleux, incompréhensible et révoltant.

La France s’appauvrit car ses politiciens sont de plus en plus stupides

H16

10/1/2024 - Mi-décembre, une surprenante proposition de loi passait devant le sénat. Passée inaperçue alors que les esprits s’occupaient des festivités à venir, cette loi – proposée par des élus écologistes, eh oui – se fixe pour but de mettre en location des voitures destinées à la casse afin d’aider les ménages les plus modestes.

Oui, vous avez bien lu : des élus écologistes proposent que des voitures destinées à la casse soit proposées en location pour des ménages modestes, illustrant ici de façon assez complète l’incroyable débilité (le mot n’est pas trop fort) d’une partie croissante de notre classe politique.

Sans même plus s’étonner qu’on puisse envisager sérieusement, dans ces périodes d’écolo-hystérie sécuritaire, de remettre sur les routes des voitures destinées à la destruction, force est en effet de se rappeler que si tant de voitures encore valables sont ainsi poussées à la casse, c’est précisément parce qu’elles ont été artificiellement déclarées impropres à la circulation par les lois (sécuritaires et anti-pollution notamment) poussées par ces mêmes guignols écologistes, dans une sorte d’obsolescence programmée que ces andouilles prétendent pourtant combattre par ailleurs.

Autrement dit, on assiste ici une nouvelle fois à l’un de ces effets parfaitement prévisibles des contraintes que des élus ont stupidement cru bon d’imposer à tous sans tenir compte des effets de bords évidents qu’elles allaient provoquer, à savoir ici, augmenter le nombre de foyers incapables d’acquérir ou de conserver un moyen de déplacement indispensable à leurs activités sociales et économiques de base.

De façon plus inquiétante, cette loi démontre aussi que directement à cause des précédentes logorrhées législatives, nombre de Français se sont très effectivement appauvris.

Et ce n’est pas cantonné aux salariés, puisqu’on apprend aussi qu’un patron de petite entreprise sur cinq gagne moins d’un SMIC mensuel : la caricature du chef d’entreprise en costume fumant un gros cigare continue de prendre du plomb dans l’aile, surtout en France, dans ce pays où, à présent, un tiers (oui, un tiers) des Français vit avec moins de 100 euros dès le 10 du mois, et ou près de la moitié d’entre eux (47%) est en découvert au moins une fois par an.

Cette réalité est pourtant niée avec véhémence par le Dilateur d’anus de Bercy qui récuse l’idée même d’un appauvrissement des Français pourtant aussi visible que documenté.


Il est clair que les signes sont là et sont si visibles que la presse, notamment celle tendrement amourachée de l’actuel pouvoir, n’hésite plus à proposer des défis ludiques pour tenter de pousser les Français à faire des économies, les considérant probablement trop amoindris intellectuellement pour entreprendre par eux-mêmes ce genre de mesures de bon sens.

Mais pourquoi diable la France s’appauvrit-elle, et aussi vite actuellement ?

Les raisons sont multiples et, pour certaines, largement connues de tous : il y a bien sûr cette inflation provoquée d’une part par des décisions géopolitiques d’une stupidité abyssale, et d’autre part par une création monétaire destinée à des dépenses inconsidérées pendant trop d’années, notamment pendant la crise pandémique qui aura vu un coup d’accélérateur sans précédent à la plus désastreuse allocation de capitaux dans toute l’histoire de l’Humanité. Quand vient le moment de la facture, on se retrouve tout d’un coup plus pauvre que prévu…

En outre, les décisions politiques débiles se sont multipliées : l’obligation d’abandonner les moteurs thermiques en fut une comme évoqué en introduction, le choix encore plus stupide de fermer des réacteurs nucléaires en fut une autre.


Mais réellement, pourquoi a-t-on pris ces décisions (dette colossale, confinements, politique énergétique calamiteuse, sabotages industriels en série) ?

Il y a bien sûr l’évidence d’un gouffre maintenant évident entre les buts (pas humanistes) des dirigeants et ceux du peuple : les dirigeants, élus ou non, se sont tous monté le bourrichon à force de quatrième révolution industrielle, d’Agenda 2030, de contrôle de la population, de contrôle du climat et de leur propre pouvoir.

Mais il serait trop facile d’exonérer les élus d’une tare plus grave, et aussi plus lourde de conséquence : ils sont progressivement de plus en plus stupides.

Car oui, on peut très bien empiler les objectifs les plus grandioses ou délirants, manipuler toujours mieux les médias, le langage et les foules, mais En Même Temps faire preuve d’une sottise toujours plus visible et plus profonde.

Il suffit de constater l’application avec laquelle ces élus enfilent systématiquement les propositions les plus délétères et s’étonnent ensuite avec une naïveté confondante des résultats qu’elles provoquent une fois appliquées : pour compenser une mesure inutile de fermeture obligatoire des commerces pendant la pandémie, ces imbéciles injectent des milliards d’euros dans l’économie qui provoquent une inflation redoutable, que ces mêmes imbéciles compensent en distribuant des chèques et des bonus gouvernementaux.

Ces derniers entraînent une augmentation des prix des biens et services concernés mais chez les imbéciles, la surprise est pourtant totale : diable, les réparations d’appareils ménagers sont plus chères depuis qu’on a créé un bonus étatique à ce sujet, mais qui aurait pu le prévoir ?!


Certes, ces élus sont en partie le reflet de la population qu’ils sont censés représenter.

Mais en partie seulement car ils sont surtout le reflet de ce que le système actuel, peu démocratique et très peu représentatif, permet de faire accéder au pouvoir : ce ne sont pas les plus doués intellectuellement, ce sont juste les plus doués pour se faire élire, pas plus. Il suffit de parcourir les rangs de l’actuelle Assemblée nationale pour comprendre que rares sont les élus qui peuvent se targuer d’une vraie finesse intellectuelle, et encore plus rares d’une solide culture politique et économique.

Au final, le peuple récolte surtout des politiciens doués pour se faire élire mais incultes et intellectuellement limités qui enchaînent donc âneries sur âneries. L’actuel système ne permet plus de sélectionner des politiciens réellement intelligents. C’est aussi pour cela que ce pays est foutu.


9 janvier 2024

Nouvelles du déclin intellectuel

Maxime Tandonnet


Un sondage OpinionWay, paru ce 7 janvier dans La Tribune Dimanche, met en lumière les lacunes historiques, culturelles et civiques des jeunes âgés de 16 à 24 ans. Et le résultat est alarmant. Selon ce document, seuls 54% des sondés savent que la Révolution française a commencé en 1789, quand plus de 77% d’entre eux sont incapables de préciser à quel moment la peine de mort a été abolie en France. À la question « en quelle année Hitler a-t-il accédé au pouvoir en Allemagne », seulement 37% des jeunes ont répondu correctement. Si les jeunes nés entre 1999 et 2007 ont du mal à dater les grands événements historiques, le sondage révèle également des lacunes quant à leur compréhension. Ainsi, 38% des sondés n’ont jamais entendu parler de la « rafle du Vel d’Hiv », quand 32% d’entre eux ne savent pas ce que veut dire le terme « Solution finale ». Mais ce n’est pas de la faute des écoliers, des collégiens et des lycéens. La vérité, c’est que le déclin scolaire et intellectuel a été organisé. En quelques décennies, l’enseignement de l’orthographe, de la grammaire, de la littérature, de l’histoire événementielle, des sciences et des mathématiques a été volontairement étranglé, à l’image de la réforme Blanquer du lycée de 2019 qui, en supprimant les séries (littéraire, économique, scientifique) et en achevant de massacrer le bac, a représenté une étape supplémentaire dans la course au nivellement et à la médiocrité. Mais tout le monde est coupable, la gauche bien sûr mais aussi la droite qui naguère voulut supprimer l’enseignement de l’histoire en série scientifique. Et les coups de menton viril sur « l’uniforme scolaire », les redoublements ou le SNU ne feront qu’amplifier la catastrophe en détournant l’attention des véritables enjeux. Faire croire que le clonage vestimentaire est une réponse à l’effondrement intellectuel contribue méchamment à la crétinisation de masse. Bêtise, bêtise, bêtise… L’abêtissement passe aussi par le culte des jeux vidéos, l’idolâtrie footballistique, l’effarante stupidité des deux tiers de la télévision. Le renouveau de la France passe, avant toute autre considération, par la réhabilitation de l’excellence, du mérite, de l’esprit critique, de la liberté de pensée et de la curiosité intellectuelle. A l’inverse du conformisme ambiant et de la passion uniformisatrice.

LE SEUL NOM QUI S'IMPOSE

Gabriel Nerciat

Franchement, je ne comprends pas l'embarras du Banquier Président.
Pourquoi ne nomme-t-il pas à Matignon Pierre Palmade ?
Cela me semble le candidat idéal, au point précis de l'évolution idéologique actuelle du macronisme.
Ni de droite ni de gauche, d'origine girondine, profondément disruptif dans son usage de l'alcool et de la cocaïne (même en janvier), "en même temps" proche de Michèle Laroque, l'ex-Madame Barouin, et de Muriel Robin précurseur du néo-féminisme woke en France, marié quelque temps à une femme beaucoup plus âgée que lui et "en même temps" fervent adepte des amours de Sodome, partisan d'une régulation avertie et d'une régularisation administrative généreuse des mignons et des gitons originaires du Maghreb, expert dans l'art de prendre sans nuance les tournants de la vie, sceptique et frivole sans être pour autant véritablement drôle, indifférent à tout ce qui n'est pas lui et son mal-être, assez bourgeois dans ses moeurs pour affecter d'éprouver le mépris du peuple qui roule en diesel et respecte le code de la route mais suffisamment progressiste dans ses amitiés pour être invité à déjeuner par François Bayrou chez Ledoyen, dégagé de toute allégeance partisane et peu suspect de mettre un jour sa main dans la culotte des filles, il est, je crois, le seul nom qui s'impose.
Franchement, qui dit mieux ?
De toute façon, il ne sera pas plus insignifiant qu'Elisabeth Borne ou Jean Castex, et il doit savoir compter jusqu'à 49,3.
Alors ?
C'est moi que Macron devrait embaucher à l'Elysée, pas Bruno Roger-Petit ou Alexis Kohler.